mardi 4 mars 2014

Les Diafoirus de La Droite: potion ou poison?



Le dimanche 2 mars, la télévision d'Etat belge organisait un "débat" entre partis politiques "traditionnels" et "petits" partis, ces derniers préférant d'ailleurs le sobriquet de "partis émergents". Le média public n'avait pas choisi ces petits partis au hasard. Il s'agissait de veiller à ce que ces formations ne présentent pas d'idées dangereuses pour les partis au pouvoir (ni pour les fonctionnaires prétendant représenter l' "Etat"), tout en étant suffisamment distrayants, pittoresques et colorés pour "faire le show".

Bien sûr, la multitude des micro-partis qui n'avaient pas été invités s'est sentie grugée et - le mot est à la mode - discriminée. Parmi ces micro-partis, certains ne dépassent pas la défense de privilèges de groupes particuliers contre les intérêts de tous. Il existe par exemple un "parti des pensionnés". Il se pourrait bientôt que se crée un "Parti des Buveurs de Bière", comme il en existe en Pologne, ou, pourquoi pas, une "Union des Presbytes" ou un "Mouvement Révolutionnaire Végétarien".

Mais il est d'autres micro-partis au message bien plus dangereux pour le pouvoir en place: celui qui exige le rétablissement de toutes les libertés individuelles et l'élagage massif et sévère d'un Etat devenu monstrueusement obèse, omniprésent et étouffant. C'est le cas de "l'Union des Libéraux" ("UdL"). J'ai eu l'honneur et le plaisir de participer au lancement de ce parti, et à l'élaboration, à ses débuts, de son programme. Je ne m'en suis écarté (tout en restant membre) que parce que le programme ne réussissait pas à résorber la fracture entre ce que le web-zine "Contrepoints" a appelé les "bisou-libéraux" et les "facho-libéraux": ceux qui prônent une immigration libre (en dissolvant la sécurité sociale qui attire un grand nombre de migrants) et ceux qui prônent une égale liberté pour le migrant ET pour la population existante de refuser ou d'accepter cette migration (ce qui n'a rien de "facho"!). Migrer ne peut être une décision unilatérale du seul migrant, qu'il imposerait au pays de "pénétration", et quelle que soit la forme de cette imposition. Comment également refuser aux populations existantes le droit de s'associer pour mutualiser leurs risques, si la sécurité sociale doit être démantelée sous la pression des migrants? Bien entendu, la mascarade de "sécurité" sociale qui existe aujourd'hui n'a plus rien à voir avec une mutualisation des risques des participants, et ne sert plus qu'à siphonner les revenus pour les dilapider en dépenses publiques. Mais souhaiter la disparition d'une fraude pyramidale "à la Madoff" et interdire toute association libre sont deux choses bien distinctes.

Pour en revenir à ce "débat" de la télévision d'Etat, l'un des absents était un micro-parti intitulé "La Droite". Il est crédité de quelques pourcents dans les intentions de vote telles qu'exprimées aujourd'hui dans les sondages. Bien sûr, ce parti, dont certains points du programme sont très "à droite", aimerait à lui seul, représenter les valeurs "libérales" face aux machines de guerre des "grands" partis, ceux qui se partagent le pouvoir depuis plus de trente ans, sans alternance, et sans autre programme que de conserver et même multiplier à l'infini leurs sinécures.

Dans un commentaire, un membre fondateur de l'UdL a très justement souligné que "La Droite", comme les autres "non-invités" n'avait élaboré aucun programme. Il serait donc illusoire (et dangereux) de croire que ce parti défendrait des valeurs libérales, en particulier en ce qui concerne la libre entreprise.

Cette réaction a, sans surprise, provoqué une levée de boucliers de la part de ... "La Droite". Et l'un de ses représentants nous invitait à lire son "manifeste". Piqué par la curiosité, et surtout par l'affirmation que "La Droite" défendait l'entreprise privée, j'ai lu avec beaucoup d'attention le charabia de ce "manifeste".

D'emblée, "La Droite" veut plus d'Etat: "Les valeurs de La Droite s’articulent autour d’un rôle fort dévolu à l’Etat.". Or l'Etat, truffé d'incompétents qui l'ont transformé en une organisation criminelle, est le véritable problème. La multiplication des couches de fonctionnaires, où ils s'entassent selon le "Principe de Peter" est totalement hors de contrôle: chacun est nommé jusqu'à ce qu'il atteigne son niveau d'incompétence, où il creuse sa tranchée, dans l'attente d'une retraite qui sera, comme son salaire, mis à charge d'un secteur privé déjà étouffé.

Le "manifeste" invente des fonctions régaliennes et omet par contre celles qui sont vraiment essentielles. Depuis quand un Etat est-il chargé du maintien de la paix "sociale"? Hayek a brillamment démontré que "social" ne veut rien dire. Pire, écrit-il, ce mot est utilisé lorsque l'on n'a rien à dire. Ce mot est à peine mentionné dans le Traité de Rome. Par contre, le projet mort-né de constitution européenne était truffé de "social", répété des dizaines de fois, peut-être parce que l'Europe n'a plus rien à proposer.

Pour "sécurité" et "justice", évoquées dans le "manifeste", chacun peut être d'accord. Sauf que l'Etat remplit ces fonctions de plus en plus mal, ou plus du tout, et pour un coût de plus en plus élevé. La "justice" est devenue une farce, et les juges n'appliquent plus la loi aveuglément et quel que soit le statut des parties. Ils sont devenus un instrument de redistribution de la richesse. C'est d'ailleurs cette aberration que recommande le "Manifeste": "la mission prioritaire [de l'Etat est] de protéger en toutes circonstances et en tout domaine le faible contre le fort". Faut-il rappeler que la Loi s'applique à tous de la même manière, forts et faibles, et que, dans le cas contraire, ce n'est plus la Loi?

Quant à la relation entre Etat et religion, "La Droite" ne devrait pas se contenter de copier les français et leurs absurdes principes de "séparation" ou de "laïcité". Il serait infiniment plus efficace de revenir aux principes de celui qui a, pour la première fois dans l'Histoire, rédigé et fait approuver une loi sur la liberté religieuse (Thomas Jefferson, en Virginie): "l'Etat ne "reconnaît" aucune religion". POINT. "Séparer", c'est "reconnaître". Et au nom de quoi faudrait-il en "reconnaître" une ou plusieurs? Et au nom de quoi l'Etat s'abstiendrait-il de remplir ses fonctions dans un domaine "séparé"? L'Etat n'a pas non plus à "garantir" la liberté du culte: les autres libertés (mouvement, opinion, expression), valables pour tous, sont parfaitement suffisantes. Et si ma religion, c'est de croire en la théière volante d'Alice au pays des merveilles? Cette croyance n'est pourtant pas plus ridicule que toutes les autres. Elle est même plus respectable encore, parce que c'est la mienne et que personne (aucun barbu, aucun ensoutanné, aucun circoncis) ne me l'a dictée.

"La Droite" imagine l'existence d'un "contrat social" que personne n'a jamais vu et surtout que personne n'a jamais signé. Encore une fois "social" est un mot creux que l'on agite lorsque l'on n'a rien à dire.

Mais le vrai visage de "La Droite" est dans l'affirmation qu'elle veut renvoyer dos-à-dos la loi du marché et le collectivisme. Elle affirme qu' "aucune rupture ne sera possible tant que l’économique dictera la conduite du politique au point de contrevenir à l’intérêt général des peuples et des Etats." Et qui définirait cet "intérêt général", si ce n'est ... des fonctionnaires, qui ont toujours confondu ce mythique "intérêt général" avec leurs propres privilèges?. Est-ce par "intérêt général" que nous avons des "inter-communales" truffées de politiciens médiocres sans aucune compétence, et qui nous volent en exigeant les prix les plus élevés d'Europe (si ce n'est du monde!) pour l'eau, l'électricité, le téléphone, le gaz, etc....?

Et comment affirmer "que les entreprises doivent pouvoir se développer au mieux selon les critères du marché" alors que le "Manifeste" ne propose aucune mesure pour réduire les charges monstrueuses (détournées au profit des administrations) qui pèsent sur toutes ces entreprises, dont le nombre de faillites atteint des records absolus, dépassés chaque mois?

"La Droite" affirme que le logement et l'emploi sont des "droits". En vertu de quoi? Plus ils en font des "droits", moins il y en a! Chaque emploi public détruit deux emplois privés. Chaque logement social détruit deux logements privés, simplement par les charges qui sont déplacées vers les seuls propriétaires privés (occupants ou bailleurs). Un Etat qui devient à la fois logeur et législateur, établira bien entendu des lois pour favoriser les administrations-propriétaires au détriment du marché, introduira des distorsions, corrompra les signaux du marché, accordera une puissance illégitime à des fonctionnaires-logeurs, et ... multipliera les sans-abris!

Si l'Etat a un rôle fondamental à jouer dans l'enseignement, rien ne dit qu'il doit aussi dispenser lui-même cette éducation, et faire de ces "dispensateurs" des fonctionnaires inamovibles, payés sur fonds publics jusqu'à leur décès. Il serait douteux que ces fonctionnaires inculquent un "comportement critique" à l'égard de l'Etat qui les nourrit. Et en quoi faut-il forcer l'enfant à "adhérer, en connaissance de cause, aux valeurs, aux normes et aux idéaux de notre société"? On en arrive dans ce cas aux situations telles que celle qui m'a un jour horrifié: des enseignants de première année primaire entraînant leurs élèves en rue, embrigadés dans un cortège contre l'attaque de la Lybie (ou était-ce l'Irak, ou l'Afghanistan...?), en les contraignant à frapper sur des casseroles. Aucun de ces enfants ne pouvait lire ou écrire. Aucun n'aurait pu situer le pays "attaqué" sur une carte, ni expliquer ce que signifiait "bombarder". Encore une fois, dans le "manifeste" de "La Droite", l'expression "l'école joue un rôle social", le mot "social" est utilisé parce que le programme n'a rien à dire. Il est d'ailleurs préférable de ne pas creuser ce que "rôle social" a pu signifier de hideux dans l'Histoire...

Le rôle de l'enseignement ne peut être ce que "La Droite" exige qu'il soit: "égalitaire". Le rôle de l'école est d'identifier, et de permettre l'épanouissement, des talents. Cela implique des jugements d'excellence, des "classements", et, horreur pour les régimes totalitaires, des réussites personnelles, y compris matérielles. L'égalité ne pourrait se réaliser qu'au prix de la médiocrité dans l'uniformité. Mais peut-être l'Etat idéal, pour "La Droite" n'est-il là que pour produire des adultes en uniforme?

En matière d'écologie (parce qu'il est de bon ton de mentionner ce mot) le "manifeste" prône d'utiliser "au mieux les mécanismes de l'économie de marché". Est-ce ce même "marché" que le texte condamne quelques lignes plus haut? Il y aurait donc un "bon" marché et un "mauvais" marché? Et qui différenciera?

En matière d'Europe, le manifeste omet d'en revenir aux sources de l'Europe. Le premier Traité, celui de Rome, attribuait à l'Europe un seul "but essentiel": "l'amélioration constante des conditions de vie et d'emploi de leurs peuples". Depuis 1999, c'est raté. Et le Traité ne mentionne nulle part que les conditions de vie des uns doivent s'améliorer au détriment de celles des autres (cette fumeuse "solidarité" qui n'est que le synonyme d' "appauvrissement collectif". Et pour en revenir à cet objectif initial, que propose "La Droite"? Rien. Pour les libéraux authentiques, soit l'Europe remplit efficacement la fonction qui lui a été assignée, soit il faut en sortir.

Sur l'immigration, élément essentiel de la "boîte à outils" électorale de "La Droite", les remèdes ressemblent plus aux prescriptions des docteurs Diafoirus de Molière que de véritables solutions. En quoi les besoins économiques des "pays" doivent-ils être pris en compte? Si "La Droite" défendait réellement la liberté individuelle, ce parti aurait basé son raisonnement sur la personne, et certainement pas sur la culture, ni l'ethnie, ni la civilisation. Bien sûr, pour la droite "dure", la personne ne compte pas. "La Droite" ne répond pas non plus aux libéraux "bisounours" qui préconisent la liberté des migrants sans se préoccuper le moins du monde de la liberté des individus qui occupent déjà le pays de "pénétration" et voient leur conditions de vie se dégrader.

Et lorsque "La Droite" écrit dans la même phrase que son "combat" est celui "de la démocratie au service des droits individuels" mais que le "contrat social" doit être "universel", cela ferait sourire si c'était de l'humour. Malheureusement, cela ne l'est pas: le parti tente le grand écart entre liberté individuelle et contrainte "sociale". Et chacun sait que ces "contraintes" et ces "contrats" sont toujours les instruments par lesquels les régimes totalitaires ont détruit les libertés. Toutes les libertés.