mardi 26 mars 2013

Produit Intérieur Brut contre Bonheur Individuel Net?



Résumé

Quelques semaines à peine avant que la crise ne frappe l'Europe, le président français avait invité des Prix Nobel d'Economie à lui proposer des instruments de mesure de la richesse nationale destinés à remplacer le bon vieux PIB. Depuis la crise, le rapport est oublié, et le PIB est revenu en force, car il mesure à la fois la futilité des efforts de mettre fin à la crise par de la monnaie facile, par de nouvelles taxes, par de la rigueur, ou par des plans de "redressement productif". Le PIB stagne depuis cinq ans. Pire, la part de ce PIB confisquée par les Etats tend à augmenter, et la part que les citoyens peuvent conserver pour la satisfaction de leurs propres besoins est de plus en plus réduite. Cette discordance entre un PIB inchangé et des revenus individuels en baisse mérite effectivement que l'on envisage de changer d'instrument de mesure. Un "Produit Intérieur Libre" ne mesurerait que les dépenses libres et non contraintes des citoyens. Il exclurait les dépenses des fonctionnaires et celles réalisées avec des allocations, nécessairement prélevées au préalable sur d'autres revenus. Il permettrait d'approcher de beaucoup plus près le résultat de ce que la Déclaration d'Indépendance des Etats-Unis nomme comme l'un des trois droits fondamentaux, au même titre que la vie et la liberté: "la recherche du bonheur" individuel.


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Les lauréats du Nobel ne sont pas à l’abri de coïncidences malheureuses, qui font que leurs efforts les mieux intentionnés puissent - parfois - être vains. Il en est ainsi des résultats des travaux de la «Commission pour la mesure des performances économiques et du progrès social», présidée par deux Prix Nobel d’économie, Joseph Stiglitz et Amartya Sen. Cette commission avait été mise en place en février 2008, par le président français d’alors, et avait été chargée de trouver des indicateurs du progrès social plus pertinents que le Produit Intérieur Brut (PIB). Sarkozy était en effet «insatisfait de l’état actuel des informations statistiques sur l’économie et la société».

Rarement étude a été demandée et livrée plus à contretemps que celle-là! A peine remise à Sarkozy, la crise de 2008 frappait l'Europe, et la France en particulier. Cette crise dure toujours, et les recettes appliquées par les Etats, soucieux surtout de se préserver eux-mêmes, n'ont fait que l'aggraver. Aujourd'hui, plus personne ne se préoccupe de mesurer "autrement" la richesse: l'essentiel est d'éviter la ruine.

Pour rappel (et en simplifiant à l’extrême), le PIB est, dans l’une de ses définitions les plus courantes, «l’addition des valeurs de marché de tous les biens et services produits au cours d’une période donnée» (par exemple une année). Ces «valeurs» comprennent les taxes, ce qui est une première difficulté. Les prélèvements de l’Etat n’ajoutent rien à la valeur intrinsèque du bien ou du service et, de plus, la taxe, une fois prélevée, est réinjectée par l’Etat sous forme de nouvel achat, de nouveaux fonctionnaires, etc. Si les citoyens achètent des automobiles pour un total d’un milliard d’euros, la valeur nette n’est que de 826,4 millions (supposant une TVA de 21%). La différence de 173.6 millions servira à engager 4.000 nouveaux fonctionnaires qui, à leur tour, vont dépenser, etc…

Obnubilés par ce que Keynes a nommé "le multiplicateur" (les dépenses publiques sont censées «multiplier» la consommation), les Etats ont oublié que ce sont la consommation et l’investissement par le secteur privé (grâce aux revenus qui permettent cette consommation) qui sont l’unique base du développement économique. Les «moyens publics», avant d’être «injectés» ont dû nécessairement, au préalable, être soustraits à cette consommation et à cet investissement.

Dans l’exemple des automobiles, le PIB, net de taxes, n’est que de 826,4 millions. Le PIB total sera évalué à 1 milliard (automobiles) + 173,6 millions (consommation des fonctionnaires) + etc... Mais ce total est purement artificiel et n’ajoute strictement rien à l’utilité que retirent les citoyens des voitures qu’ils achètent. Dans une crise, le soi-disant «multiplicateur» keynésien fonctionne en fait dans le sens inverse: c’est un «diviseur». Une baisse de la vente de véhicules pour un milliard entraînerait une baisse bien plus importante du PIB. Pire, les 4.000 fonctionnaires engagés, ne pouvant être licenciés et étant à charge de la société pendant une durée moyenne de 60 ans (vie "active" + retraite), le "diviseur" est plus important que le "multiplicateur", il persiste soixante fois plus longtemps, et l'économie régresse plus vite qu'elle n'a progressé.

La deuxième difficulté est illustrée par deux exemples donnés par Stiglitz lui-même: le premier concerne les transports publics, le second a trait au "réchauffement climatique", réel ou supposé.

Pour les transports publics, les mesures du PIB incluent le coût de l’équipement (déduction faite de la dépréciation), les salaires de tous les travailleurs concernés, et les recettes reçues des voyageurs. Ce montant ne varie pas énormément selon la fréquentation d’une ligne particulière. La conséquence est évidente: si une ligne sous-utilisée est fermée, cette décision réduira le PIB, alors qu’elle élimine un gaspillage et permet même de réduire des taxes et donc d’augmenter les revenus individuels. Le PIB diminue, mais le bien-être de tous (sauf celui des chefs de gare!) augmente.

Dans l’exemple du «réchauffement» climatique, l’augmentation des taxes n’est plus justifiée que par une hypothétique hausse des températures. Cette taxation ne sera pas réduite si le «réchauffement» ne se matérialise pas. Les «Léviathans» de ce monde ont trouvé un prétexte idéal (de leur point de vue) pour augmenter le niveau de la taxation et l’intrusion des bureaucraties dans la vie des individus. Les gouvernements augmentent les taxes (et donc réduisent le bien-être) afin d’affecter ces nouvelles recettes à des projets destructeurs de richesse et qui pourraient ne jamais être amortis. Le PIB théorique augmente donc fortement au début du cycle, pour retomber brutalement ensuite, et retrouver un niveau plus bas encore que celui atteint avant l’intervention des bureaucraties.

Ici, citons l'exemple de la politique de soutien belge aux investissements des particuliers en photovoltaïque. Il s'agit là d'une véritable démonstration des effets pervers d'une intervention bureaucratique visant à détourner les ressources vers des usages destructeurs de richesses. Les particuliers ont investi massivement dans ces installations, provoquant une "bulle", financée par des crédits devant être remboursés par des "certificats verts", c'est-à-dire de la monnaie artificielle. Mais les capacités financières de la Région ne permettent pas de rembourser ces "assignats" [1] par de la monnaie réelle. Le PIB a donc été artificiellement augmenté par la bulle lors des installations (matériel, main d'oeuvre, TVA). Mais le défaut de remboursement des assignats réduira d'autant la consommation future de ceux qui se sont laissé abuser par les promesses. Si les panneaux leur permettent de réduire leur consommation (ce qui reste à démontrer), le PIB sera également réduit d'autant. Afin de compenser les pertes de taxes, l'Etat sera contraint de taxer ce qu'il avait promis de subsidier, et donc de provoquer une troisième baisse du PIB...

On voit donc immédiatement que toute mesure du niveau de vie doit déduire les dépenses publiques, les impôts et autres taxes, les dépenses subsidiées, les dépenses contraintes, la part des services publics qui ne seraient pas payés librement à leur juste valeur. A partir de cette base, il doit être possible d’imaginer un étalon réaliste, entre l’ancien instrument de mesure du PIB, qui additionne les dépenses individuelles librement consenties, et les prédations de l’État. Il importe peu que l'Etat justifie par l'un des slogans à la mode: "développement durable", "juste redistribution", "progrès social". Ce dernier, le "progrès social" n'est par exemple qu'une utopie qui détruit toutes les individualités dans «Le meilleurs des mondes» [2].

Cet étalon mesurerait le résultat des seuls efforts individuels, et l’accroissement de la qualité de vie que chaque individu retirerait de ses seuls efforts. La source d’inspiration peut être trouvée dans Adam Smith lui-même, dans un paragraphe si clairement exprimé et si moderne qu’il a été cité par Alan Greenspan, ancien président de la Réserve Fédérale américaine, dans son essai autobiographique.

«L'effort naturel de chaque individu pour améliorer sa condition, quand on laisse à cet effort la faculté de se développer avec liberté et confiance, est un principe si puissant, que, seul et sans autre assistance, non seulement il est capable de conduire la société à la prospérité et à l'opulence, mais qu'il peut encore surmonter mille obstacles absurdes dont la sottise des lois humaines vient souvent embarrasser sa marche, encore que l'effet de ces entraves soit toujours plus ou moins d'attenter à sa liberté ou d'atténuer sa confiance.» [3]

Ce nouvel instrument de mesure ne devrait donc mesurer rien de plus que la somme des «efforts naturels» de tous les individus, dont serait déduit (et non ajouté, comme dans le PIB), le coût des «obstructions» placées par l’État en travers de ces efforts.

Les principes de base pour la mesure des performances d'un pays peuvent être définis très simplement. Deux ans avant le début de la crise, en réaction à un article de "The Economist" sur ce même sujet [4], j'avais suggéré au magazine de proposer l'utilisation, comme instrument de mesure des revenus des citoyens, ce que j'appelais un "Produit Intérieur Libre" ("PIL"), c'est--à-dire un RNN ("Revenu National Net") dont on éliminerait toutes les dépenses pour des services publics qui seraient contraints, surévalués ou subsidiés. Un exemple serait le péage pour les autoroutes. En France, sur certains tronçons, particulièrement les plus fréquentés et les plus anciens, les coûts de construction ont été amortis depuis longtemps, et moins de 10% du montant réclamé pour l'utilisation de ces tronçons sont affectés aux frais d'entretien et de réparation des sections en question. 90% du péage sont donc "contraints" et "détournés" au profit d'autres usagers, vers d'autres routes ou, plus vraisemblablement, au budget général de l'État et aux salaires des fonctionnaires.

Ce "PIL" mesurerait la création de richesses concrètes, et éliminerait les transferts de (et vers) l'État, la spoliation et le gaspillage. Cet indice serait basé sur une évidence: un État ne crée pas de richesses, pas plus qu'il ne crée le bonheur. L'unique raison d'être d'un État est de permettre à "ses" citoyens de rechercher leur propre bonheur personnel, comme ils l'entendent eux-mêmes, et non sous le commandement de fonctionnaires, qu'il soit matérialisé par des injonctions, des interdictions, des taxes ou des amendes, ou qu'il prenne la forme de subsides avec des moyens détournés d'autres usages.

Mesurer le niveau de vie, et sa qualité, grâce à un "PIL" mettrait fin également aux contradictions que l'on constate de plus en plus, entre les convictions exprimées par les citoyens sur la dégradation de leur bien-être et une évolution, en sens contraire, d'un "PIB" qui ne correspond plus à aucune réalité, et cumule des éléments positifs (la consommation privée) avec des éléments négatifs (les impôts, amendes et autres spoliations).

Illustrons ceci par deux exemples.

Le premier concerne les pays qui ont abandonné le collectivisme pour libéraliser leurs économies, par exemple en Europe centrale et orientale. Les mesures du PIB se sont effondrées immédiatement après l'adoption des réformes. Paradoxalement pourtant, la grande majorité de la population continuait à accepter et même soutenir les réformes. Si un "PIL" avait été utilisé à cette époque, son évolution aurait démontré que ces populations n'étaient pas masochistes. Elles réalisaient très vite au contraire qu'un PIB où la part de l'État est de 100% ne signifie plus rien, et que 50% de liberté est préférable à 100% de servitude.

J'ai eu le privilège d'aider à introduire, dans quelques-uns de ces pays, l'infrastructure légale et financière permettant cette libéralisation. Dans l'un de ces pays en particulier, il fallait introduire un système de crédit hypothécaire permettant aux occupants d'un logement d'en devenir propriétaire (la propriété foncière y était interdite depuis 50 ans). La demande pour ces prêts montrait que les citoyens n'avaient qu'un seul désir: éliminer totalement la propriété publique des logements. La comparaison avec la France, où des gouvernements oscillant entre colbertisme et collectivisme ont imposé un "idéal" de 20% (en attendant pire...) de logements publics dans chaque municipalité, est édifiante [5]!

Le second expliquerait pourquoi le pessimisme ambiant dans la plupart des pays d'Europe de l'Ouest voisine avec un PIB stable. En fait, une part de plus en plus grande du PIB est confisquée et, dans la plupart des pays le montant supplémentaire que l'Etat s'approprie est supérieur à l'augmentation du PIB. Des taux de taxation rigides, sur un revenu nominal plus élevé (mais un revenu réel en baisse, suite à l'inflation), font que l'Etat détourne une part de plus en plus importante du revenu réel, expliquant la baisse du niveau de vie général. Un ministre des finances belge se vantait avant la crise d'une augmentation des recettes fiscales de 5,8% alors que le PIB global n'avait progressé que de 1,4%. Début 2013, l'Etat poursuit cette prédation: une augmentation de 2% des prélèvements au profit de l'Etat (eux-mêmes dépassant 60% du PIB) est envisagée, alors que le PIB en 2012 et 2013 devrait stagner. Dans chacun de ces deux exemples, un "PIL" aurait montré deux baisses considérables des revenus "libres", et donc du bien-être réel des citoyens.

La comparaison des "PIL" de deux pays permettrait de comprendre pourquoi les citoyens ont parfois le sentiment d'être plus heureux dans une "dictature libérale" que dans une "démocratie totalitaire", pour paraphraser Friedrich Hayek, un autre Prix Nobel (mais se situant aux antipodes de la pensée collectiviste de Joseph Stiglitz). Les régimes de plus en plus collectivistes (qualifiés de "modèles de solidarité" par leurs promoteurs) font payer leurs "services publics" par des prélèvements obligatoires sans rapport direct avec l'usage de ces "services". Les gouvernements font valoir la "satisfaction" des usagers dont la contribution est très largement inférieure aux coûts réels des services. Mais ils omettent de déduire de cette "satisfaction" la réduction de bien-être (bien plus importante) qu'entraînent impôts et taxes payées par les non-usagers, sans aucune contrepartie.

Dans la droite ligne de Keynes, certains se réjouissent des catastrophes (la "reconstruction" augmente le PIB), de l'insécurité (explosion du nombre de policiers, des dépenses de sécurité, des primes d'assurance, etc..). Toutes ces dépenses n'augmentent en rien le niveau de vie: des portes blindées offrent moins de sécurité aujourd'hui que des portes ordinaires dans les années 1970. Remplacer un millier de voitures brûlées tous les week-ends n'ajoute rien à la qualité de vie des propriétaires, et réduit le niveau de vie de tous, les coûts étant répartis dans la société (mais n'en étant pas moins bien réels!)

Il est quand même des dépenses "sociales" que Mr Stiglitz juge réductrices du PIB. Il admet par exemple que "si vous emprisonnez un plus grand nombre de personnes, le PIB augmente mais personne ne prétendrait que ceci dénote un progrès social". Malheureusement, Mr Stiglitz s'arrête devant l'obstacle et n'ose pas le franchir. Il aurait fallu admettre également que toute confiscation de ressources par l'Etat, que ce soit pour construire des prisons, engager plus de policiers, ou pour tout autre usage, aboutit à un gaspillage de ressources, et donc à une destruction du bien-être. Dans une société où la moitié de la population serait en prison, et où l'autre moitié serait geôlier, le PIB serait considérable, mais le "PIL" serait de zéro.

Pour conclure, chaque individu devrait rester le seul juge de ce qui constitue pour lui un "progrès". Ce progrès ne peut provenir d'un partage, ni d'un gaspillage, ni du simple remplacement de ce qui existait mais a été détruit ou volé. C'est donc la somme des récompenses, pleines et entières, des efforts de chacun d'améliorer son propre sort, et à l'exclusion de toute contrainte. Le "progrès social", par opposition, implique nécessairement de prélever à l'un le fruit de ses efforts pour distribuer ce fruit à d'autres. Si le Produit Intérieur Brut, tel qu'il existe, cumule efforts, taxes, et redistribution des taxes, cet instrument ne mesure rien d'autre que la puissance de coercition des bureaucraties. Le "Produit Intérieur Libre", par contre, ne mesure que les efforts, et en déduit la taxation et la redistribution.

NOTES

[1] Les assignats étaient des promesses de paiement, émises par les révolutionnaires français, et censées être "garanties" par les "biens nationaux", c'est-à-dire des propriétés que l'Etat avait lui-même confisquées. A l'origine émis pour 400 millions, les assignats enflèrent très vite, pour atteindre 2 milliards, puis 6, puis 27 et enfin 46 milliards. Malgré des réductions des taux d'intérêt promis, et malgré un "emprunt forcé sur les riches", ces ancêtres des "certificats verts" perdirent 97% de leur valeur, et furent finalement supprimés, après avoir ruiné ceux qui avaient fait confiance à l'Etat.

[2] Titre d’un roman d’Aldous Huxley (1932), dans lequel une épigraphe (de Nicolai Berdiaev, qui avait fui le collectivisme soviétique), concluait par le rêve que la société abandonnerait toutes les utopies, et deviendrait moins "parfaite", mais plus “libre”.

[3] Alan Greenspan, "Le temps des turbulences", 2007

[4] The Economist, "Measuring economies", 11 février 2006

[5] On a pu ainsi entendre récemment l'adjointe au maire de Paris, candidate au poste lors des prochaines élections, annoncer fièrement, dans les médias que 3/4 des logements à Paris sont des logements publics. Pour un Etat totalitaire, c'est une fierté. Pour un Etat se prétendant "patrie de la liberté", ce devrait être une honte.

jeudi 21 mars 2013

Chypre: entre courage et bricolage


Mr Bruno Colmant vient de poster sur son blog son avis sur la crise chypriote:
http://blogs.lecho.be/colmant/2013/03/chypre-ordre-social-ou-mon%C3%A9taire-.html

C'est un catalogue - qu'écris-je? - un dictionnaire, une encyclopédie, de mots creux, preuves d'une méconnaissance complète du monde bancaire.
"comprendre les réalités sociales", "ordre social" "ordre monétaire", "adhésion constructive", "apaisement social ET monétaire", "démocratie", "l'euro, forgé pour sceller la paix entre les nations".
C'est ignorer superbement une des raisons d'être des banques centrales (qui peut parfois être assumée par une agence de supervision indépendante): maintenir la solidité du système bancaire.
La solution au problème Chypriote, comme d'ailleurs au problème belge, était - et elle est encore aujourd'hui - très simple. Elle est (généralement, à l'exception peut-être de la Corée du Nord ou de Cuba) inscrite dans les statuts de l'autorité de supervision: il faut fermer les banques défaillantes, en leur retirant - éventuellement sur le champ - leurs licences). Ce qui ne veut pas dire annuler les créances sur ces banques, comme nos ministres des finances successifs ont essayé de nous le faire gober (Reynders: "pour sauver l'épargne, il faillait sauver les banques" - en anglais: "bullshit"!)
Une banque peut être fermée en un instant (les statuts de l'organe de supervision, inscrits dans la loi, le permettent), et les comptes ré-ouverts immédiatement, mais dans un autre établissement. Les actifs seront ensuite vendus, mais sur une période qui permet une liquidation dans l'ordre.
J'ai été conseiller de plusieurs banques centrales, et les gouverneurs que j'y ai conseillé ont eu le courage d'appliquer la loi. C'est ainsi que des banques (chaque fois des banques d'Etat!) ont été fermées sur le champ (une banque en Slovaquie et deux banques - les plus importantes du pays! - en Serbie). Aucun déposant n' a perdu un centime. Mais, au moins, les banques n'ont pas continué à pourrir le système financier.
Si la Belgique avait eu le courage d'appliquer la loi en 2008, le coût pour le contribuable aurait été de moins de 10% du PIB. Aujourd'hui, nous en sommes à près de 30%.
Mais il fallait dissimuler au peuple les connivences (pour ne pas dire les complicités) entre appareil d'Etat et banques (Mr di Rupo ne mettait-il pas ses compétences de chimiste au service de Dexia, en tant qu'administrateur, au moment de son "expansion", y compris en Grèce, y compris lors de ses investissements dans les "subprimes"?).
La complicité fut bien pire encore: les communes, principales actionnaires de Dexia, gonflaient encore leurs prévisions de recettes en 2010 par des "dividendes" équivalant à 12% du capital "investi", alors que le taux d'intérêt consenti aux épargnants était déjà inférieur à l'inflation, et taxé de surcroît, et que ce n'était plus un mystère pour personne que les pertes de Dexia étaient supérieures à son capital! Mais ne fallait-il pas, coûte que coûte (aux contribuables!) maintenir la pompe à phynances ("Ubu-Roi") des gabegies communales?
J'n suis arrivé à la conclusion qu'il existe deux sortes de politiciens: les courageux (qui ne seront pas réélus) et les lâches (qui ne se soucient que de leur réélection). A l'étranger, j'ai travaillé avec la première catégorie. En Belgique, existe-t-il autre chose que la seconde?