mardi 1 octobre 2013

Le libéralisme brade-t-il ses valeurs?


 
Le libéralisme est aujourd'hui confronté au pourrissement de la démocratie, qui n'est plus qu'une succession de compromissions entre des groupements d'intérêts aux ambitions contradictoires, et qui vendent leurs votes pour des intérêts de castes, sans se soucier des intérêts individuels, dont seule la somme constitue l'intérêt général. Des fonctionnaires voteront pour ceux qui leur promettent plus de privilèges et encore moins de travail, des commerçants voteront pour ceux qui leur font miroiter moins d'impôts et plus de policiers, les chômeurs voteront pour ceux qui s'engagent à augmenter leurs indemnités en diminuant les exigences, et ceux qui ont la chance de travailler voteront pour ceux qui prétendent augmenter leur salaire "net" en imposant la charge des avantages sociaux aux entrepreneurs.

Faute d'une refondation totale du fonctionnement de la démocratie, par exemple en responsabilisant les citoyens, ou en liant le financement des partis aux revenus de leurs adhérents (et non aux nombres de votes), le libéralisme doit choisir entre deux voies radicalement différentes. Soit il devient accommodant, complice, naïf. Soit au contraire il reste ferme sur ses principes, s'oppose à toute compromission, et demeure résolument critique à l'égard de toute enfreinte à ses principes, aussi minime soit-elle.

L'attitude à adopter face à la propriété est une parfaite illustration. Pour les authentiques libéraux, la propriété individuelle est la base même du fonctionnement de la communauté, et de la possibilité d'accroître le bien-être de tous. Sans respect du droit de propriété, il ne peut y avoir de liberté. En effet, si Paul peut s'emparer de la propriété de Pierre, ou le contraindre à la partager, il n'y a aucune liberté possible pour Pierre. Ni pour Paul d'ailleurs, puisque Pierre pourrait parfaitement agir envers lui comme il a agi lui-même. Et ceci reste vrai même si Pierre et Paul ont "voté" pour un chef qui, ensuite, répartit les biens selon son bon vouloir.

Mais ce droit de propriété est d'autant plus bafoué aujourd'hui que l'Etat a choisi de baser une part de plus en plus grande de ses revenus sur la valeur des propriétés. Ce sont non seulement les taxes à l'achat et à la vente. Ce sont aussi les prélèvements sur les plus-values, les taxes foncières et d'habitation, et toute la collection des prélèvements sur la valeur.

Il ne faut pas entendre ici que le libéralisme rejette toute taxation destinée à entretenir la part des infrastructures communes qu'utilise, par exemple, tout occupant d'un logement. Mais la seule manière justifiable de percevoir la quote-part de ces frais est, bien évidemment, sur les revenus de l'utilisateur, et certainement pas sur la valeur de son bien.

On voit immédiatement la cohérence au centre du libéralisme (et, par comparaison, la confusion dans les méthodes de taxation pratiquées par les administrations). Dans les pays où des bulles immobilières ont enflé, puis explosé, les fonctionnaires ont allégrement encaissé des revenus artificiels au cours de la période de hausse, jusqu'à l'effondrement total des ventes et des recettes, et le blocage total du marché. Si l'ensemble des taxes avait été perçues sur les revenus des citoyens, les recettes des États et des administrations locales n'auraient que faiblement augmenté dans le temps, ce qui est certainement plus justifiable d'un point de vue moral (autant qu'économique!) que des revenus publics dépendant d'effets d'aubaine et d'évaluations artificielles.

Toute compromission du libéralisme avec les méthodes actuellement pratiquées, dans ce domaine comme dans tous les autres, aboutit à son affaiblissement. Abandonner une partie de sa liberté, c'est cesser d'être libre. Un parti authentiquement libéral, s'il veut faire partie d'un gouvernement, doit absolument imposer cette évidence. Et donc refuser toute mesure qui n'irait pas dans le sens d'une élimination des pratiques actuelles, et d'une refondation complète du processus démocratique.

La France est un exemple parfait d'une construction de plus en plus complexe, destinée à dissimuler plus de trente ans de gabegie. Et les conservateurs sont à peine moins responsables que les socialo-communistes de cette fuite en avant. Pour les premiers, seul l'État peut décider des secteurs où innover, embaucher, investir. C'est le "Concorde", le "France", les "grands travaux", les "entreprises d'État". Pour les seconds, il suffit de taxer ceux qui réussissent pour que seul l'État ait les moyens d'embaucher. C'est l'enseignement, les contrôles, les revenus de remplacement, les emplois "aidés".

Le libéralisme lutte contre l'un et l'autre, le conservatisme et le collectivisme. Comme l'écrivait Cécile Philippe, directrice de l'Institut Molinari, dans une Tribune récente publiée dans Le Figaro ("Fiscalité: l'idéologie à la manoeuvre", 1er octobre 2013):

"L'État prend d'une main ce qu'il redonne de l'autre comme si ce passage obligé par la case "État" sanctifiait le revenu obtenu. Or, c'est justement là que le bât blesse. La fiscalité et les subventions - loin de glorifier la création de richesse - suscitent toutes sortes d'effets pervers qu'il est grand temps de considérer avec sérieux".

Tout cela est très vrai, et le libéralisme doit défendre, sans compromis aucun, toute politique qui supprime perceptions et subventions, taxes et aides, impôts et revenus de remplacement. Or Mme Philippe continue son article en défendant les niches fiscales. Et ceci sous le prétexte que celles-ci sont "des moyens octroyés au fil du temps par les pouvoirs publics pour rendre la pression fiscale et sociale plus supportable".

Tenter de "justifier" une partie de l'équation "État", c'est défendre la totalité du système. Citons un exemple belge: une pression fiscale extrême, qui fait du Royaume surréaliste d'Ubu le détenteur du record mondial des "prélèvements obligatoires", a amené l'État et ses multiples déguisements à voler plus de 50% des revenus, même les plus modestes. Ce taux est en effet appliqué dès 3.000€ mensuels. Offrir en contrepartie de cette prédation des "chèques-restaurants", ou des "éco-chèques", ou encore des "voitures de fonction" traités plus "favorablement" du point de vue fiscal, est une aberration et une hypocrisie. Un voleur qui cambriolerait toute ma maison, puis viendrait me "rendre" une bricole sans valeur, reste un criminel. Un vrai libéral exigera à la fois la baisse des prélèvements et l'élimination des "restitutions" partielles.

Certes, comme le dit le titre de la Tribune de Mme Philippe, "l'idéologie est à la manoeuvre". Mais ce sont les idéologies de droite et de gauche qui sont à la manoeuvre. Ce qui gouverne aujourd'hui est une idéologie étatique. Le libéralisme, quant à lui, n'est pas une idéologie. Il ne demande que le rétablissement des libertés individuelles. C'est-à-dire de ces vraies "valeurs républicaines", celles de la Révolution Française: "Liberté, Propriété, Sécurité et Résistance à l'Oppression". Les fausses valeurs inventées plus tard, et dont nous rabâche l'État, lui ont permis d'étendre ses tentacules jusqu'à étouffer la société. "Égalité" et "Fraternité" ne sont en effet que des ersatz destinés à masquer la nuisance de l'État, en lui permettant de mener nos vies à notre place, en prétendant imposer l'égalité et se substituer à la fraternité.

samedi 28 septembre 2013

L'Etat, pilleur de tombes


Benjamin Franklin écrivait que "dans ce monde, rien ne peut être considéré comme certain, à l'exception de la mort et des taxes". Des Etats ont été plus loin: ils ont imaginé qu'un citoyen mort était encore plus facile à dépouiller qu'un citoyen en vie. Ils ont donc appliqué au moment du décès de chacun ce que l'administration appelle du doux nom de "droits de succession" et qui n'est en réalité qu'une taxe de mort, une "death tax", pour utiliser une expression américaine certes moins poétique mais beaucoup plus conforme à la réalité: un vol par l'administration, et pour son seul profit.

Rien n'est plus facile, puisque celui qui fixe les règles est aussi le bénéficiaire direct de ces règles. C'est ainsi que la mafia wallonne avait profité d'une "régionalisation" de la taxe de mort pour s'octroyer, dans certains cas, 90% des biens d'un défunt. Sous un fumeux prétexte hérité du complexe de "Robin des Bois" (voler les riches n'est pas vraiment voler), ce taux confiscatoire s'appliquait aux "gros" héritages, c'est-à-dire dès .... 175.000 euros, soit à peine la valeur d'un appartement. Ce taux s'appliquait lorsque l'héritier n'avait pas de lien "direct" avec le défunt, une discrimination de plus dans l'appareil spoliateur de l'association de malfaiteurs qu'est devenue l'Union des Régions Socialistes de Wallonie (l'U.R.S.W.) C'est donc cette organisation criminelle qui fixait les taux, et qui était ainsi seule à "succéder" au défunt.

Dans une optique libérale, cette taxe sur la mort pose une question pratique et trois questions morales.

La question pratique porte sur la capacité - ou plutôt l'incapacité - de toute administration publique (composée par définition de fonctionnaires inamovibles, donc irresponsables) de gérer les biens du défunt plus efficacement que les héritiers désignés par lui. Les biens ainsi dérobés par les fonctionnaires sont immédiatement affectés à l'entretien de l'appareil d'Etat, donc d'eux-mêmes.

Lors de l'une des nombreuses "régionalisations" en Belgique, on a vu le "ministre" du budget wallon de l'époque, l'œnophile Michel Daerden, pérorer à la télévision en se gaussant du pactole qu'il confisquait au profit de ses complices, lors de l'une des successions les plus importantes de l'époque, portant sur la propriété d'une entreprise estimée à cent millions d'euros. Le défunt avait eu la mauvaise idée de ne pas produire d'héritiers "directs"... Daerden se léchait littéralement les babines à l'idée d'empocher, sans aucun effort, 90 millions d'euros qui iraient enfler la gabegie wallonne.

Bien entendu, la société en question a aujourd'hui disparu. L'U.R.S.W. est encore moins capable de gérer une société que d'administrer ... un Etat!

Ce taux de 90% ressemblant plus à une spoliation pure et simple qu'à une taxation, l'héritier, s'estimant grugé, et n'ayant plus grand chose à perdre, entama un marathon judiciaire. Au bout de longues arguties (l'Etat spoliateur étant lui-même juge et partie!), le "Conseil d'État" (aujourd'hui retoqué "Conseil Constitutionnel") déclarait, dans une décision clôturant la dispute en 2005, que le taux de 90% volé par la Région wallonne était effectivement "disproportionné". Par contre, ce même Conseil d'État jugeait que 80% était "proportionné", mais sans prendre la peine de justifier sa décision. Le Conseil n'est d'ailleurs pas à court d'euphémismes, parlant de "confiscation", au lieu de "spoliation", pour ce qui est le taux le plus élevé d'Europe.

Un cambrioleur qui s'emparerait de 80% de vos biens est donc légitimé. Par contre, s'il a l'audace de vous voler 90%, son crime devient "disproportionné". C'est donc la première question morale qui se pose: une administration peut-elle déclarer elle-même "légitime" une "proportion" de son propre vol?

La deuxième question morale porte sur le droit qu'aurait un État de discriminer entre les catégories d'héritiers. C'est ainsi que le vol de 80% lors d'une transmission entre cousins serait "proportionné", tandis que les héritiers "directs" ne pourraient être spoliés "que" de 40%. Notons au passage que, même à ce taux, les ayant-droits seraient contraints de renoncer à un bien immobilier pour payer la "taxe de mort" exigée par l'U.R.S.W. Le but est donc de confisquer progressivement les actifs des citoyens, pour les rendre ensuite dépendants de la "générosité" et de la "sollicitude" des fonctionnaires qui ont phagocyté cette fiction qu'est l' "État".

Enfin, il est permis de se poser la question de savoir de quel droit un État désigne certains héritiers comme "directs" ou "réservataires", interdisant ainsi à quiconque de décider librement de la répartition de ses avoirs après son décès. La plupart des États anglo-saxons ont réussi à réprimer leur désir de supprimer cette liberté fondamentale - la dernière dont dispose un citoyen - et qui est partie intégrante du droit de propriété. Aux Etats-Unis par exemple, chacun reste très logiquement libre de décider de la transmission de ses biens après son décès. Les États victimes de la dictature napoléonienne ne voient par contre dans la mort d'un citoyen que le moyen de s'approprier ce qui n'a pas déjà été taxé de son vivant, à la manière de ces détrousseurs de cadavres qui volaient les bottes des soldats morts sur les champs d'extermination de ce même "empereur" des français.

Une authentique réforme libérale devrait éradiquer ces pratiques sordides, assimilables à celles des pilleurs de tombeaux. Et cette réforme serait fondée sur deux principes, et deux seulement. Le premier serait de rendre à chacun la liberté absolue de disposer de ses biens comme il l'entend. L'État n'aurait qu'un rôle subsidiaire: si le défunt n'a pas exprimé sa volonté, la loi peut définir, par défaut, une "hiérarchie" dans les héritiers. Le second principe serait la suppression pure et simple de la "taxe de mort", quelle que soit la valeur des biens du défunt, et quelle que soit la relation entre le défunt et ses héritiers.

En guise de conclusion, il faut bien admettre qu'un vol déclaré "légal" par le voleur lui-même reste un vol. Le silence de l'Europe sur la prédation des États, dans ce domaine comme dans d'autres, fait de cette Europe la complice des criminels. Il est vrai que la partie "socialiste" de l'Europe rêve du modèle soviétique, où la propriété, et donc la transmission de celle-ci, était interdite, avec les conséquences que l'on a connues. La discussion au sein de l'Europe ne serait d'ailleurs pas entre "prédateurs" et "non-prédateurs", mais entre différents niveaux de prédation.

Si la légitimité de la propriété ne peut être fondée que sur le travail et l'épargne du produit de ce travail, cette légitimité ne s'arrête pas avec le décès du propriétaire. Ce dernier doit rester entièrement libre de transférer à qui bon lui semble le produit de ses efforts. Et, comme toujours, la captation de biens par une bureaucratie n'a jamais eu, nulle part, d'autre résultat que la destruction d'investissements productifs pour les transformer en biens de consommation que s'approprie - et que dilapide - cette même administration. Avec pour résultat l'appauvrissement de tous.

jeudi 12 septembre 2013

Taxer la misère



La ritournelle des États-voyous est familière: ils ont besoin de taxer leurs citoyens à des niveaux extrêmement élevés parce qu'ils leur fournissent des "services publics gratuits" qu'ils se vantent parfois même d'être "de qualité". En réalité, ces États-voyous fournissent surtout des fonctionnaires. Et chacun aura remarqué que l'économie et la société "fonctionnent" d'autant moins bien au fur et à mesure qu'ils empilent des "fonctionnaires". Une évidence que soulignait le Fonds Monétaire International:

“Au plus un gouvernement est efficace dans l’exécution de ses fonctions, au moins élevé sera nécessairement le niveau des dépenses publiques”. [1]

Un niveau élevé de prélèvements est donc un indicateur de l'incompétence et de l'inefficacité d'un gouvernement. Dans ce domaine, il est intéressant de comparer le poids de la fiscalité dans différents États. Une comparaison de la fiscalité des entreprises est peu significative, car, dans ce domaine, les États se livrent une concurrence effrénée, s'imaginant attirer de nouveaux investissements, ou éviter l'exode des entreprises. La fiscalité des revenus des individus est plus révélatrice, car elle touche aux droits fondamentaux des citoyens aux revenus de leur travail, et parce que les citoyens sont moins mobiles, et donc plus corvéables, que les entreprises.

En décrivant le système de la “colleganza”, un cadre légal appliqué dans la république de Venise pour permettre le partenariat entre capital et travail, un historien soulignait que le rôle du gouvernement vénitien se limitait à la définition des droits et obligations des parties, et à l’administration de la justice permettant d’imposer le respect des règles. Le pouvoir se contentait d’une modeste taxation des entreprises et des profits ainsi financés. Cette frugalité d'un État, économiquement puissant, parce qu'il était resté volontairement dans les limites de son rôle, est incontestablement l’une des raisons de la richesse de Venise, tant celle des gouvernants que celle des gouvernés.

“[...] la taxation vénitienne était faible - infinitésimale en comparaison des sommes punitives prélevées par les byzantins sur leurs propres marchands, ou par la plupart des princes de l’Europe féodale. Ainsi les profits étaient élevés, les motivations étaient considérables, et l’investissement en capital augmentait d’année en année.” [2]

Il n'étonnera personne que l'"exception" belge s'inspire plus de Byzance que de Venise, d'ailleurs définitivement supprimée en tant que république indépendante, en mai 1797, par nul autre que Bonaparte, ce grand défenseur d'un État modeste et limité …

La Belgique d'aujourd'hui, championne auto-déclarée des droits de l’homme, confisque une part significative des revenus de ses citoyens les plus modestes, afin de subvenir aux énormes besoins de sa gigantesque bureaucratie, aussi tentaculaire que dysfonctionnelle et nuisible. Le tableau compare ce que les citoyens de ce royaume ubuesque sont autorisés à conserver de leurs revenus annuels avec la part que conservent les plus modestes aux États-Unis. La tranche de revenus prise en compte va de 0 à 4000 €, et le taux de prédation est celui qui s'applique aux revenus de 2012, pour un célibataire sans enfants [3]:



Il est atterrant de constater que ce sont précisément les bureaucraties vociférant leurs prétentions à l’égalité, et qui prétendent justifier leur propre existence parasitaire dans leur prétention à imposer par la contrainte cette prétendue égalité, qui confisquent aussi la plus grande partie des revenus les plus modestes. Au niveau de 1.200 euros de revenus mensuels bruts (c’est-à-dire à peine supérieur au niveau de pauvreté aux Etats-Unis), la bureaucratie américaine confisque 10%, mais la kleptocratie belge vole déjà 20% du revenu brut d’un citoyen. En fait, les Etats-Unis, décriés par les politiciens européens pour leur manque de “solidarité”, sont aussi le pays qui taxe le moins les revenus les plus modestes: il est préférable d’être pauvre aux Etats-Unis qu’en Belgique, cette dernière confisquant une part considérable des revenus les plus modestes.

Bien entendu, le tableau ci-dessus ne peut tenir compte des multiples distorsions, exemptions, exceptions, déductions, et autres complications inventées par les administrations dans le seul but de justifier leur existence. Certaines de ces perversions peuvent être dissimulées avec beaucoup de talent par ces bureaucraties. Si, en Belgique comme dans d’autres pays, un minimum de revenu est exempté d’impôt, avec le raisonnement que les personnes aux revenus les plus modestes doivent être mises à charge de la société, un stratagème permet à la bureaucratie non pas de déduire ce montant de revenu minimum du total des revenus, mais de déduire le montant des impôts dûs sur ce minimum (c’est-à-dire pas grand chose) du total des impôts exigibles. D’un coup de crayon bureaucratique, tous les citoyens sont donc imposés - abusivement et au mépris de l’équité sociale que l’administration agite sous le nez des redevables - à un niveau de revenu artificiellement rehaussé. Si la première "tranche" imposée à 25% est supposée être de 8.350€ annuels, elle n'est en réalité que de 1.550€!, la prédation étant déjà de 30% dès 700€ mensuels, montant inférieur au niveau de pauvreté!

L'extrême injustice de cette perversion dissimulée dans les codes [4] est donc préjudiciable aux revenus les plus modestes. Et la progression est extrêmement rapide: tout ce qui dépasse le montant de 1.000 euros bruts mensuels, pourtant proche de la misère, est confisqué au taux de 40%! La rapacité des bureaucraties est devenue telle qu'elles sont obligées d'aller débusquer leurs victimes parmi les moins favorisés des citoyens, et que même les plus modestes et les plus faibles cherchent légitimement à protéger leurs maigres revenus de leurs prédateurs.


NOTES

[1]     Victor Tanzi “Fundamental Determinants of Inequality and the Role of Government”, Document de travail du Fonds Monétaire International, WP/98/178, Décembre 1998.

[2]     “[...] In these early days Venetian taxation was low - infinitesimal in comparison with the punitive sums levied by the Byzantines on their own merchants, or by most of the princes of feudal Europe. So profits were high, incentives great, and investment capital increased year by year.” John Julius Norwich, “A history of Venice”, Penguin Books, London, 1983 [pages 155-156], traduction personnelle.

[3]     Bien entendu, le nombre d’enfants, leur âge, la situation maritale (ou co-habitationnelle...), et une myriade d’autres conditions sont autant d’excuses pour varier les taux, et fouiner dans les détails de la vie privée des citoyens.

[4]     Contrairement aux Etats-Unis, où le citoyen complète sa déclaration de revenus en y calculant lui-même les impôts dus (même si ce calcul peut être rectifié par l’administration), la France et la Belgique considèrent leurs citoyens comme des débiles mentaux incapables de calculer le montant des revenus qu’ils auront à abandonner à la férocité et à la goinfrerie des fonctionnaires.

lundi 22 juillet 2013

Détroit et la destruction créatrice


 
Selon Joseph Schumpter, la "destruction créatrice" est au coeur même du capitalisme. Mais qu'est-ce que le capitalisme, sinon l'accumulation de moyens de production, qui permettent l'allongement des processus de fabrication? Bien sûr, les collectivistes revendiqueront la propriété du capital pour l'Etat (donc pour des fonctionnaires irresponsables), alors que les libéraux, bien au contraire, restent convaincus que les décisions concernant le capital doivent être soit sanctionnées par la faillite, soit récompensées, et donc que le capital ne peut appartenir qu'à des personnes privées, responsables de leurs décisions, qui en paient les conséquences ou en récoltent légitimement les fruits. Dans le premier cas, un système fondé sur l'irresponsabilité ne peut que s'effondrer avec fracas, comme le Mur de Berlin et toute la misère qui se cachait derrière celui-ci. Dans le second cas, s'ensuit une considérable amélioration de la qualité de vie, et un recul de la pauvreté.

Sans "destruction créatrice" il ne peut exister aucun développement. Si le contraire était vrai, les fabriques de diligences subsisteraient aujourd'hui, et 8 milliards d'êtres humains auraient besoin de 100 milliards de chevaux pour se déplacer, et pour transporter leurs marchandises. Heureusement (notamment pour l'environnement, car les ancêtres des "écologistes" avaient prédit au 19ème siècle que le crottin de cheval recouvrirait Londres jusqu'aux toits!), les diligences ont connu une période de "destruction", qui a ouvert la voie à une période bien plus "créatrice". Cette destruction, suivie de création, a permis à un nombre infiniment plus grand de personnes de se déplacer sur des distances bien plus longues, dans un confort bien plus grand, et à des vitesses bien plus élevées.

Mais nos sociétés modernes sont caractérisées par des forces considérables qui s'opposent à la partie "destruction", sans réaliser que, sans elle, il ne peut y avoir de "création". Ces forces de régression sont l'Etat, d'une part, et les syndicats politisés de l'autre. Le meilleur exemple de ces ennemis de l'amélioration du niveau de vie sont ceux qui, en France, hurlent pour "interdire les licenciements"!

L'Etat est ici compris comme cette fiction qui permet à un groupe de personnes de prélever une partie des richesses sans contrepartie, et sans le consentement explicite des spoliés. Il ne s'agit donc pas seulement de ces parties d'administrations qui se réclament de l'Etat souverain, mais aussi de toutes les sub-divisions (formes de métastases) de cet Etat (régions, départements, communes, etc...) qui dépendent, pour leur propre subsistance, du monopole de la violence que s'est arrogé l'Etat central dit "souverain".

Aujourd'hui, les syndicats ne sont plus ce qu'ils n'auraient jamais du cesser d'être, à savoir une représentation légitime des intérêts des travailleurs d'une entreprise particulière. Ce sont devenus des organisations politiques, souvent financées par l'Etat bien plus que par leurs adhérents, et qui mobilisent des moyens de pression nationaux contre des entreprises isolées. Lorsque ces syndicats prétendent représenter les intérêts de fonctionnaires d'Etat (ou de ses métastases), ils cumulent bien évidemment les deux dangers: monopolisation de la violence "souveraine" contre les citoyens, et utilisation des moyens de ces mêmes citoyens contre ceux-ci. Les cotisations syndicales des fonctionnaires sont bien évidemment payées, comme leurs salaires, par les citoyens, qui fournissent ainsi à ces fonctionnaires les armes avec lesquelles ils les détruisent.

Dans le cas de la ville de Detroit, ces deux formes de prédation (pouvoirs publics et syndicats) se sont alliés pour mener la ville dans une situation financière si désespérée qu'elle n'a pas eu d'autre option que de demander sa mise en faillite. Sur des dettes totales évaluées à 18 milliards de dollars, les engagements futurs à l'égard de ses propres employés (retraites, soins de santé, etc...) représentent ... plus de 10 milliards! Or les recettes de la ville se sont effondrées: elles sont passées de 1,9 milliards par an en 2002 à 1,5 milliards en 2012. En d'autres mots, les employés municipaux ont refusé d'ajuster leurs revenus à la faculté de la ville d'extorquer ces ressources des autres citoyens. Il n'étonnera personne que plus de citoyens encore aient fui cette prédation, accélérant la chute.

A ceux qui s'imaginent que des villes ne peuvent mourir, parce que leurs fonctionnaires pourront toujours voler la propriété des résidents (après avoir volé leurs revenus), il n'est pas inutile de rappeler le cas de l'ancienne Rome impériale. Sa population dépassait un million au faîte de sa puissance. Cinq siècles après la chute, la "ville" ne comptait plus que dix mille pauvres hères tentant de survivre dans des ruines. Sans eau (les barbares avaient volé le plomb des aqueducs, comme aujourd'hui le cuivre des chemins de fer), sans nourriture (les barbares avaient envahi le Maghreb, grenier à blé de Rome), sans sécurité (l'armée elle-même était composée de barbares) les conditions de vie étaient redevenues préhistoriques. Et ce qui restait de l'Etat ne pouvait s'emparer de propriétés qui n'existaient plus...

Au sommet de sa gloire, Détroit comptait 1,8 millions d'habitants. Elle n'en a plus que 700.000 aujourd'hui. Son déclin est plus rapide que celui de Rome... Il est moins onéreux de détruire une maison que d'en payer la taxe foncière!

Le sens commun exige que les villes qui voient leurs populations s'enfuir pour échapper à la prédation de l'administration et au déclin, ne peuvent plus ajuster leurs budgets en augmentant encore leurs taxes (ils n'ont plus de victimes à rançonner...), mais n'ont d'autre solution que de réduire leurs dépenses, et leurs dettes. Et la seule technique est d'officialiser, par la faillite, leur incapacité de payer les salaires, retraites, soins de santé, et la multitude de privilèges consentis à leurs propres fonctionnaires.

Face aux invasions barbares qui diminuaient ses ressources, la Rome impériale avait interdit à chacun de quitter son emploi, et avait même imposé aux fils de reprendre le métier de leur père. On sait ce qu'il est advenu de cet Empire-là! Aux Etats-Unis, Détroit et 30 autres villes tentent de se dégager de leurs obligations vis-à-vis de leurs employés en demandant à une juridiction spécialisée de prononcer leur faillite: en fait, d'acter l'évidence.

En France (et en Belgique) une ville ne peut tomber en faillite. Elle est placée "sous tutelle". Mais quand est-il lorsque toutes les villes ont des dettes qu'elles ne peuvent rembourser? Faudra-t-il attendre un nombre suffisant de faillites municipales pour que l'État lui-même se déclare incapable de faire face à ses obligations?

Un système plus pervers encore pourrait être appliqué aux Etats-Unis: Une armée d'avocats attaquent la ville en prétendant que sa demande de mise en faillite est "inconstitutionnelle". (Selon eux, les fonctionnaires ne "peuvent accepter moins que ce que la ville leur a promis"...) Gageons que, au moment où la décision sera prise, le total des honoraires des avocats seront supérieurs aux dernières possessions de la ville.

En effet, aux Etats-Unis, le système légal ayant été kidnappé par la caste des avocats, la liquidation des biens "collectifs" de Detroit (s'il en reste...) ne reviendra jamais à ceux qui les ont payés (les citoyens) ou à ceux qui les réclament (les fonctionnaires), mais à la clique des avocats des faillites.

En définitive, la faillite de Détroit (et toutes les faillites des villes et Etats qui suivront) se résume à une question: jusqu'où des fonctionnaires pourront utiliser le monopole de la violence pour extorquer des avantages qu'ils se sont eux-mêmes accordés, et qu'ils ont refusés à leurs victimes, c'est-à-dire à leurs citoyens?

Après avoir fait fuir ses citoyens, la ville de Détroit doit encore se débarrasser de sa dette, de ses fonctionnaires, et ... des avocats qui font obstacle à sa destruction créatrice!

vendredi 7 juin 2013

Un Nobel de pacotille



Pour le "vulgum pecus" que nous sommes devenus, les Prix Nobel devraient distinguer des carrières particulièrement utiles à l'ensemble de l'humanité, des sommets intellectuels, des avancées majeures dans les sciences. C'était indiscutablement le cas pour des gens comme Camus, Einstein, ou Hayek et des centaines d'autres "lumières".

Mais, comme toute chose, les prix Nobel se déprécient avec le temps. Qui voudrait encore aujourd'hui du titre de "César", pourtant très recherché dans l'Antiquité romaine? Comme pour les "Césars", de moins en moins respectables, les Nobel se déprécient par le niveau de ceux qui se voient décerner cette médaille. Obama fut lui-même étonné de se voir attribuer un Prix alors qu'il n'avait encore rien accompli. Le Prix attribué à l'Union Européenne a été suffisamment ridiculisé, ne serait-ce que parce que trois bureaucraties ne parvinrent même pas à s'entendre sur le nom de celui qui irait chercher la récompense. Ce hochet était d'ailleurs d'autant moins mérité que l'Union a lamentablement échoué dans ce que les Traités définissaient comme son but essentiel (et le seul!): "l'amélioration constante des conditions de vie et d'emploi de leurs peuples". Face à leurs échecs, les bureaucraties s'étaient donc inventé, a posteriori, un but (le maintien de la paix) qui n'existait pas dans le Traité original, celui signé à Rome en 1957.

Comme toute administration qui échoue dans ses missions d'origine, l'Europe s'est donc inventée des buts artificiels. La bureaucratie européenne ne méritait certainement pas le Prix de la Paix, puisque la paix n'avait jamais été sa raison d'être. Lui attribuer le Nobel d'économie serait encore plus indécent. Mais elle serait en bonne compagnie, avec des lauréats qui ont fait plus pour discréditer ce Nobel-là que s'il avait été attribué à Bernard Madoff. Et ici, l'attribution la plus regrettable (et sans doute la plus regrettée) n'est pas celle de Merton et Scholes (qui avaient "inventé" des formules mathématiques qu'ils ont ensuite appliquées dans un fonds de placement qui a fait une faillite spectaculaire, entraînant la ruine de ceux qui leur avaient fait confiance) ou celle de Joseph Stiglitz, qui semble aujourd'hui avoir des recettes pour tout, et surtout pour nous faire avaler des recettes keynésiennes qui ont été la cause principale, si ce n'est la seule raison, de la destruction des économies, du marasme et de la dépression, du chômage et de la destruction du capital, base de notre civilisation.

Pour les Prix mérités, la distinction est une incitation au dépassement d'eux-mêmes. Pour les Prix de pacotille, le Nobel est une publicité qui fait vendre. Stiglitz a vendu des livres qui sont devenus des bestsellers, alors qu'ils n'auraient pas trouvé preneur sans cette notoriété. Mais il est un lauréat qui dépasse Stiglitz dans ce domaine. Paul Krugman, qui défend des thèses keynésiennes, pourtant discréditées par la répétition des crises, qui ont démontré l'inanité de politiques étatistes basées sur l'illusion que la monnaie crée la richesse, et que donc, en émettant plus de monnaie, on crée plus de bien-être.

Krugman a des clients, et les médias se bousculent pour lui ouvrir leurs colonnes, sachant que le peuple préfère la facilité à l'effort, la simplification d'une formule à la responsabilité personnelle. Les médias français adorent Krugman, et l'une des dernières "livraisons" du Nobel s'est étalée dans le "Courrier International", sous le titre accrocheur de "L'austérité tue", imitant le slogan imposé aux cigarettiers: "Fumer tue". Faut-il rappeler qu'il n'y a pas si longtemps, l'Etat lui-même était cigarettier et même monopoleur (la SEITA française a tué des millions de fumeurs)? Le slogan aurait donc du être, logiquement: "L'Etat tue". Et c'est ce que cet article tentera de démontrer...

Krugman monte d'abord en épingle une erreur statistique dans une étude ("Growth in a Time of Debt" - "La Croissance dans une ère d'endettement"), publiée en janvier 2010 par deux universitaires américains. Il oublie évidemment de mentionner également que ces auteurs ont corrigé ces erreurs, citant nommément Krugman, dès le mois d'août 2010, et que les corrections ne changeaient pas fondamentalement les tendances et les conclusions. La mauvaise foi pourrait-elle être Nobélisée?

L'étude en question démontrait que les économies entraient dans une spirale de dépression dès que la dette de l'État dépassait 90% du PIB. Bien entendu, Krugman peut ergoter sur ce chiffre, et prétendre qu'il devrait plutôt être de 89,9% ou de 90,1%. Bien entendu, une multitude de facteurs peuvent affecter chaque pays de manière différente: une forte croissance dans les pays partenaires commerciaux peut contribuer à une amélioration de la situation économique et à une réduction du ration dette/PIB.

Après s'être étendu sur cette erreur statistique (et avoir ignoré les corrections des auteurs qui ne changeaient rien aux conclusions), Krugman lance sa première contre-vérité: "au commencement était la bulle". Nul keynésien n'admettra jamais que la bulle est précisément, et uniquement, le résultat de politique ... keynésiennes! Si, comme l'écrit Krugman, le "marché immobilier était en surchauffe", la seule raison n'était-elle pas que les Etats (Etats-Unis, Irlande, Espagne en particulier) avaient encouragé une spéculation dans ce secteur, en laissant les risques des banques exploser démesurément, et en refinançant l'endettement par une politique complaisante visant à laisser la masse monétaire augmenter beaucoup plus rapidement que l'économie réelle. Certains Etats ont même eu des comportements criminels, puisqu'ils ont encouragé ces prises de risque. Ils bénéficiaient d'ailleurs de ces "bulles" qu'ils créaient, sous forme de taxes diverses sur les constructions, d'impôts sur les bénéfices des sociétés, et de taxes sur les salaires.

Il est donc faux de prétendre qu' "au commencement était la bulle". En réalité, au commencement, étaient des politiques keynésiennes d'expansion monétaire sans relation avec l'économie réelle. Et, comme l'a dénoncé Hayek à plusieurs reprises, cette politique "krugmanienne" a entraîné des excédents d'investissements (un détournement de l'épargne) dans des secteurs économiques qui ne peuvent enfler que lorsque le taux d'intérêt est maintenu artificiellement en-dessous du taux d'équilibre. Des investissements à long terme (typiquement dans l'immobilier) sont donc réalisés, alors qu'ils ne le seraient pas sans expansion monétaire artificielle, ou sans taux d'intérêt maintenu artificiellement bas.

Aux Etats-Unis, où la crise a trouvé son origine, les autorités de supervision bancaire ont lamentablement failli à leur mission. Et elles ne peuvent utiliser comme excuse la politique qui leur était imposée par l'Etat de diriger une part des crédits hypothécaires vers les couches "défavorisées" de la populations, c'est-à-dire, en pratique, vers ceux qui avaient déjà fait défaut sur des crédits précédents, ou qui n'avaient aucun moyen de rembourser leurs crédits. Les banques inventèrent des artifices pour attirer ces couches "défavorisées": souvent, des taux artificiellement bas étaient proposés pendant une première période (généralement deux ans), puis, dès la troisième année, des taux plus proches du marché faisaient monter les mensualités à des niveaux que les emprunteurs ne pouvaient plus payer. Il ne faut pas s'étonner que des spéculateurs bâtirent des fortunes en misant sur l'incapacité des emprunteurs de rembourser à partir de la troisième année... Mais où étaient les superviseurs?

Les gauchistes dénonceront les spéculateurs. Jamais ils n'admettront que ceux qui ont misé contre un système aberrant instauré par l'Etat n'ont fait que dénoncer eux-mêmes une absurdité. A terme, l'explosion de la bulle a révélé l'injustice et même le caractère criminel de l'Etat. Pour contraindre les banques à financer les emprunteurs jugés "défavorisés", l'Etat américain avait été jusqu'à refinancer, et même assurer, les crédits "obligés". Lorsque la bulle a éclaté, les citoyens non-emprunteurs se sont vu sanctionner, et ponctionner, pour payer les conséquences de la folie de l'Etat. Comme toujours dans un Etat gauchiste, le résultat a été l'abaissement de tous dans la médiocrité, l'appauvrissement général, et non pas l'amélioration des conditions des couches décrétées "défavorisées" par des bureaucrates.

Il faut donc créer de toutes pièces un rôle pour l'État. Aucune bureaucratie n'a jamais créé quoi que ce soit: elle se contente de prélever aux uns pour acheter les voix des autres. C'est sans doute la raison pour laquelle, dans le calcul du PIB, les "revenus" de l'Etat sont appelés "transferts". Les impôts réduisant le pouvoir d'achat de Pierre servent à alimenter la consommation de Paul, et, surtout, les dépenses de fonctionnement de l' "appareil d'Etat", c'est-à-dire le train de vie des fonctionnaires, de leur engagement à leur mort.

Au coeur du raisonnement de Krugman se trouve la rengaine keynésienne: "Pourquoi l'austérité est [..] un problème? A cause de l'interdépendance: vos dépenses sont mon revenu, mes dépenses sont vos revenus". Mais, Mr Krugman, c'est précisément pour cette raison que la bulle de l'immobilier (ou celle de l'internet qui l'a précédé, et celle qui la suivra) qui a eu son origine dans de l'argent facile, émis par l'État, a créé des revenus artificiels. Puisque mon revenu (en admettant que je sois le bénéficiaire de cet argent artificiel) est augmenté sans aucune contrepartie supplémentaire de ma part, en cas d'émission de monnaie au-delà des besoins concrets de l'économie, ces moyens excédentaires dont je dispose deviennent eux aussi artificiels. Mes dépenses (artificielles) deviennent vos revenus (tout aussi artificiels).

Si j'acquiers une maison sans aucun financement, je ne fais que changer une forme d'actif (un compte d'épargne, un autre bien immobilier, des actions, etc...) en une autre forme. Il n'y a aucune inflation, aucune émission artificielle de monnaie, aucune crise à l'horizon. Si par contre, je finance la totalité de mon achat avec un financement bancaire (et on a vu des prêts hypothécaires consentis pour 120% de la valeur du bien!), de deux choses l'une: soit le système bancaire dans son ensemble transforme l'épargne de l'un en un prêt pour l'autre, soit la banque qui finance l'achat ne dispose pas des ressources, et obtient un refinancement de la part de la banque centrale (ou d'un faux-nez de l'État dans le cas des "sub-primes" américains). Voilà la recette des catastrophes. L'émission monétaire est dissociée de l'expansion de l'économie réelle.

Bien sûr, il est un bénéficiaire sournois et dissimulé (jusqu'à l'implosion) de cette "expansion" totalement artificielle: l'État lui-même, sous diverses formes. D'abord, dans le cas des crédits hypothécaires excessifs, sous formes de taxes diverses sur les achats (2% aux Pays-Bas, 6% en France et jusqu'à ... 14% en Belgique). Ensuite sous forme de transformation d'un investissement réel à long terme (le logement) en bénéfices à court terme pour toute une armée d'intermédiaires: notaires, maçons, plombiers, agences immobilières, promoteurs, etc...: un large éventail de profiteurs qui ne mèneraient pas le même train de vie si le système financier se contentait de transformer une épargne existante au lieu d'émettre de la monnaie artificielle.

Et la bulle explose, comme le font toujours toutes les bulles. Et lorsqu'elles explosent, deux courants d'idées s'opposent, en matière économique. Les vrais économistes, de l'école autrichienne, insistent pour que les scories de la folie expansionniste par l'émission de monnaie excédentaire soient éliminés. Le surplus de logements (dans le cas de la bulle immobilière) doit être cédé au prix qu'il aurait atteint si la bulle n'avait pas existé. En France par exemple, les prix des logements sont surévalués de 40% si on les compare à l'évolution générale des revenus, des loyers, et des prix des autres biens.

L'autre école, celle des intégristes keynésiens, ne voit aucun problème dans les bulles: il faut même continuer à souffler dedans, pour qu'elles enflent plus encore. L'un de ces moyens artificiels permettant de préserver et même gonfler les bulles existantes, est, selon Krugman, le système de "stabilisateurs économiques" (impôts et protection sociale). Dans la réalité, persister dans l'erreur d'une bulle en l'entretenant, ce n'est pas un "stabilisateur économique", mais une bombe à retardement. L'ajustement devra se faire, coûte que coûte, et le plus tôt sera le moins pénible. Retarder l'éclatement, c'est aggraver ses conséquences, et risquer non plus un simple dégonflement plus ou moins ordonné, mais une véritable explosion.

Mais Krugman ne voit, ne comprend, et ne vend, qu'une seule idée: il faut "inonder l'économie de liquidités". Si vous vous noyez parce que vous n'avez plus pied, Krugman ouvre grandes les vannes pour faire monter l'eau... Et c'est ainsi que Krugman en arrive même à faire l'éloge de la politique dévastatrice de la Réserve Fédérale, qui a "non seulement raboté les taux d'intérêt, mais est intervenue sur les marchés pour acheter tout ce qu'elle pouvait, depuis les billets de trésorerie jusqu'aux titres de créances d'État à long terme". En une seule phrase, Krugman résume la destruction criminelle de l'économie par des mesures absolument démentes, prises dans le seul but de préserver l'État et de détruire le secteur privé. Prenons-les dans l'ordre des recettes peu ragoûtantes préconisées par Krugman.

D'abord, détruire l'épargne, annihiler la différence entre un investissement rentable et une dépense destructrice de richesses. Il faut "raboter les taux d'intérêt". Que vous dépensiez aujourd'hui ou demain, que vous épargniez ou que vous dépensiez, que vous investissiez ou que vous détruisiez vos avoirs, pour Krugman et sa clique, il ne peut y avoir aucune différence. Si vous persistez à vous protéger de l'incertitude de l'avenir, il faut détruire vos protections: l'État est là, bienveillant, totalitaire, omniscient.

Ensuite, la Fed "achète" les créances. Soit Krugman ignore cette différence, pourtant élémentaire, entre un réescompte (où la banque qui gage ses actifs reste responsable du risque) et l' "achat" d'une créance par la Fed, où la banque se débarrasse également du risque crédit. La seconde formule est la voie grande ouverte à l'étatisation pure et simple du système financier, où toutes les décisions de crédit seront prises par des fonctionnaires, sur base de critères politiques, et sans aucune considération pour les mérites économiques d'un investissement.

Enfin, Krugmam se réjouit de voir la Fed "acheter" des créances d'État. Or ces créances financent des déficits courants (salaires et retraites des fonctionnaires, etc...). Il s'agit donc bien de permettre aux bureaucraties de survivre un temps encore, tout en détruisant tous les secteurs économiques qui produisent de la richesse. Mais, à terme, de quoi vivrait donc l'Etat? Bien sûr, comme le disait avec une désinvolture méprisante Keynes, le gourou de Krugman, "dans le long terme, nous serons tous morts". Effectivement: Keynes, Krugman et les adeptes de la secte keynésienne nous auront tous massacrés.

Krugman se délecte ensuite à attaquer les plans de rigueur imposés aux pays de la zone euro qui avaient profité de l'union monétaire pour faire exploser leurs dépenses publiques. Certains avaient même tout simplement trafiqué leurs comptes publics pour pénétrer, somme toute par effraction, dans un club qui ne devait, au départ, avoir que peu de membres. Mais la décision fut laissée aux politiques, et chacun connaît les conséquences de cet abandon, et en paie aujourd'hui lourdement le prix. Krugman ne s'attarde pas, bien évidemment, sur l'origine et les raisons de ce qui n'est, ni plus ni moins, qu'une escroquerie des États.

Aujourd'hui, la solution ne sera jamais keynésienne: la fuite en avant ne fera qu'aggraver la situation, détruire ce qui subsiste d'économiquement rentable dans le secteur privé, et enfler encore des États déjà monstrueusement obèses. Au début du XXème siècle, la part des dépenses publiques dans les PIB représentait à peine 10%. Et pourtant, l'Europe avait connu une croissance continue, et les investissements publics n'avaient jamais été aussi importants, ni aussi générateurs de progrès et de bien-être. En un siècle, deux guerres mondiales et des années de keynésianisme ont fait exploser la part de l'État dans le PIB: elle dépasse aujourd'hui en Europe 60% dans la plupart des pays. Et Krugman ne propose rien d'autre que de détruire les 40% de liberté qui nous reste, pour faire de l'Europe un gigantesque goulag. Keynes n'écrivait-il pas lui-même dans la préface de la version allemande de sa "Théorie Générale", publiée sous Hitler, que sa "théorie" état plus facilement applicable dans un État totalitaire. Voilà peut-être la seule vérité dans toute les divagations du maître à penser de Monsieur Krugman, Nobel de pacotille.

Pour Krugman, l' "austérité tue". Mais c'est l'austérité appliquée aux citoyens qui nous tuera. Par contre, l'austérité - enfin - appliquée aux seuls États nous sauvera.

samedi 11 mai 2013

La liberté de migrer: l'opinion d'un migrant



Il n'étonnera personne de constater qu'il existe presque autant de formes de libéralismes qu'il y a de personnes se déclarant libérales. Une philosophie basée sur la liberté individuelle peut effectivement être librement interprétée et personnalisée. Par contre, les doctrines totalitaires, telles que le fascisme et le socialisme, tendent à supprimer les interprétations, à imposer une ligne unique de pensée, et à condamner sévèrement les "déviances". Socialistes et fascistes marchent en rang, poings ou bras levés, en rang par quatre. Seuls les différencient la couleur des drapeaux, et les titres des rengaines, "Nationale" pour les uns, "Internationale" pour les autres.

A l'opposé de ces totalitarismes, les thèmes les plus diversement interprétés à l'intérieur d'un même "libéralisme" comprennent par exemple le rôle de l'Etat: ce rôle doit être inexistant chez les libertariens, limité chez les minarchistes, plus "inclusif" chez les Hayekiens et plus étendu encore chez les "ordo-libéraux" ou les libéraux-conservateurs. Tenter de définir l'envergure et les rôles de l'Etat impose immédiatement de se situer dans ce spectre, et peut faire éclater un accord initial parmi un groupe de "libéraux".

L'immigration est un autre thème de fracture. Certains libertariens prônent une immigration totalement libre, et qui dépendrait de la seule volonté de la personne qui a décidé de migrer. Ces libertariens ne se soucient aucunement des effets de l'immigration sur la société de pénétration, considérant (contrairement aux Hayekiens) que les sociétés n'ont aucune réalité, aucune règle, et qu'un changement complet de population sur un territoire n'aurait aucune incidence sur le fonctionnement de la société.

Les ordo-libéraux et les Hayekiens reconnaissent aux sociétés (aux groupes humains en général) un véhicule de transmission des habitudes, des comportements, des modes de vie, des règles - formelles et informelles - qui contribuent au niveau de vie de ces sociétés. Chaque groupe humain a donc atteint un niveau de développement différent des autres. Allant un pas plus loin, il est aisé de conclure qu'une immigration massive, attirée par un niveau de vie plus élevé que celui existant dans la société d'origine, pourrait importer également les habitudes et comportements qui ont été la cause d'un niveau de vie plus bas, et donc abaisser le niveau de vie de la société de "pénétration". Les hordes barbares qui ont fait éclater les frontières de l'empire romain, attirées par la richesse créée par la "Pax romana", n'ont pas enrichi l'empire. Bien au contraire elles l'ont détruit, et plongé ainsi l'Europe dans les ténèbres intellectuelles, la dislocation des échanges et la pauvreté matérielle dont le continent ne se relèvera que dix siècles plus tard, lorsque la "Renaissance" retrouvera et réinterprétera les valeurs, l'esthétique, la législation, la culture classique de l'empire.

Parmi les opinions exprimées par les meneurs d'idées libéraux, certains ont toutefois tenté de structurer une position libérale cohérente sur l'immigration, en essayant de réconcilier les libertés des uns avec celles des autres. C'est le cas de Pascal Salin, qui a consacré à ce sujet un chapitre de son ouvrage sur le libéralisme [1]. Le présent article commente les positions défendues par Mr Salin. Le point de vue exprimé dans ces commentaires n'a pas d'autre légitimité que celle de quelqu'un qui est né à l'étranger, y a travaillé et séjourné presque toute sa vie, dont toute la famille, remontant trois générations, et descendant deux autres, a toujours émigré. La seule légitimité est donc de s'interroger sur la nature et les effets de l'immigration lorsque, revenu dans son pays d'origine, un "émigrant" constate qu'il est devenu un étranger dans son propre pays. Non pas parce que ce pays lui est devenu étranger, mais parce que ce pays est aujourd'hui peuplé en majorité d'étrangers.

Mr Salin commence d'emblée par affirmer que "la liberté d'émigrer et la liberté d'immigrer" sont "un droit de l'homme fondamental". Les libéraux classiques se sont battus pour la première de ces libertés, celle de quitter un pays. Il s'agit là, en effet, du seul droit "fondamental", celui de s'affranchir d'un Etat tyrannique. Mais la liberté de sortir de chez soi n'est pas la liberté d'entrer chez les autres.

Mr Salin corrige immédiatement en précisant que "les autres doivent être libres de les accepter ou de les refuser". Mais qui sont ces "autres"? Soit Mr Salin reconnaît une autorité et une volonté "collectives" (ce qu'il refuse), soit ces "autres" sont des individus de la société de pénétration. Comment éviter dès lors que certains ne fassent venir des immigrants (par exemple pour les faire travailler à des conditions à peine meilleures que celles des pays d'origine) alors que les conséquences négatives sur le reste de la société de pénétration sont bien plus importantes que les bénéfices retirés de cette immigration? Un entrepreneur qui fait venir des travailleurs pour un chantier déterminé, puis les licencie, ne se souciera guère des conséquences pour la société si ses anciens employés décident de rester dans le pays de pénétration. Pour ceux-ci, cette décision est cohérente si les indemnités de chômage sont supérieures à un revenu d'activité dans le pays d'origine.

Comment éviter également que des immigrants, une fois installés dans une société de pénétration, n'organisent des filières permettant une immigration massive de leurs pays d'origine? Très rapidement, des communautés d'abord limitées à une famille s'étendent à des quartiers et des villes entières. Le niveau de vie existant auparavant ne peut se maintenir, et des territoires commencent à ressembler aux communautés d'origine, faisant éclater la confiance, les comportements, les solidarités de la communauté existant auparavant.

Mr Salin effectue une distinction entre "Etat" et "nation", pour formuler l'idée que, lorsque la "nation" "appartient" à l'Etat, "c'est parce que le territoire national appartient non pas à la nation mais à l'Etat que les principes d'exclusion sont définis par l'Etat". Mais "Etat" et "nation" sont tous les deux des fictions. C'est tellement vrai que tous deux s'acharnent à plaquer des symboles sur ces deux notions artificielles, pour tenter de leur donner une apparence, à défaut d'une réalité.

La seule chose qui importe, c'est la libre adhésion des individus à un ensemble de règles, de comportements, d'habitudes, par les individus. C'est cette adhésion qui crée une communauté. Ces usages communs, familiers aux autres, définissent le degré plus ou moins grand de confiance entre les membres d'une collectivité. Plus la confiance est grande, plus les échanges entre les membres en sont facilités. Malheureusement, des groupuscules vont tenter de se baser sur ce consentement de base, pour inventer des concepts artificiels ("nation", "Etat" ou pire: "Etat-nation"). L'artificialité de ces concepts est d'autant plus évidente que les "nations" et les Etats ne sont que des bricolages de "nations" ou même d'"Etats". Au fil de l'Histoire, des fictions plus réduites ont été intégrées, souvent de force, parfois au gré de mariages princiers ou de batailles gagnées, dans une fiction plus grande. Curieusement, l'éclatement des bricolages sous la pression des immigrations forcent les individus à se replier sur les fictions originales, plus petites. C'est ainsi que la Bretagne, la Provence, le pays Basque, regroupés artificiellement au sein de la fiction "France" redeviennent un refuge aux identités et aux solidarités qui se sentent menacées. S'il est facile à un Malien ou à un Algérien de se dire "français", il est plus difficile de s'inventer des ancêtres et une identité bretons. Il est donc compréhensible que les français d'origine, voyant éclater la France, se replient sur une identité et une communauté moins menacée, lorsqu'ils peuvent se l'inventer.

Ayant évacué la notion d' "Etat" et de "nation", l'argument de Mr Salin se fonde sur "une base contractuelle", qui consiste à dire qu' "un étranger ne viendrait sur le territoire de l'une de ces petites nations libertariennes [...] que dans la mesure où cela serait mutuellement profitable aux partie en cause". Ces "nations libertariennes" seraient en fait des "copropriétés" et gérées de la même manière que ces formes d'association.

Cette proposition ignore trois éléments essentiels dans le fonctionnement des "co-propriétés":

1) le pouvoir de décision est directement fonction du nombre de parts que possède un propriétaire; un propriétaire peu scrupuleux pourrait donc se transformer en "marchand de sommeil" et transformer sa part privative en une source de nuisance pour les autres co-propriétaires, les contraignant éventuellement à la fuite, et leur faisant perdre une partie ou la totalité de la valeur de leur bien;

2) la transmission du droit de propriété, lors d'une vente, est généralement accompagnée du rachat des parts dans les parties "communes" de la co-propriété, en particulier les fonds de réserve accumulés par celle-ci. Un nouvel arrivant devrait donc racheter ces droits accumulés. Or, dans une communauté, ces droits peuvent aussi être "immatériels". Mr Salin propose aux étrangers d'attribuer "les mêmes droits de vote que les autres". Mais qu'en est-il des "parties communes", et donc du prix à payer pour acheter une part dans tous ces biens matériels et immatériels qui appartiennent à la copropriété dans laquelle cet étranger veut s'introduire? Inutile de préciser que ces "parties communes" d'une civilisation sont infiniment plus considérables que les "parties communes" d'une simple copropriété, et qu'il serait inacceptable, pour les copropriétaires actuels, de démolir ces parties communes pour les remplacer par d'autres, qui seraient identiques à celles que l' "étranger" vient de quitter".

3) toute co-propriété édicte un ensemble de règles de vie en commun. Le respect de ces règles repose sur la capacité des co-propriétaires de faire respecter ces règles, non par la force, mais par un appareil juridique extérieur si un accord interne ne peut être obtenu. Dans la mesure où cet appareil est peuplé par des immigrants qui appliquent les règles de leur pays d'origine (une ambition exprimée de plus en plus clairement par certaines populations immigrées), l'issue de ces arbitrages devient incertaine.

Plus préoccupant est le fait que le raisonnement n'aborde pas des points essentiels auxquels il devrait répondre pour être authentiquement libéral:

1) la liberté de migrer pour les personnes ne peut être évoquée sans aborder également la liberté de migrer en sens inverse pour les institutions et le capital. Si les migrants tentent de fuir un Etat failli, ne faut-il pas comparer les avantages respectifs de l'émigration des habitants (qui ne change rien aux raisons qui ont fait que ces Etats ont failli) et de la transplantation d'institutions et de capital (qui pourraient faire cesser la cause des migrations)?

2) la liberté de migrer d'une société à l'autre ne reconnaît aucune valeur aux institutions, aux acquis immatériels (culture, confiance, règles de comportement non-écrites, attentes réciproques, etc...) et aux acquis matériels (infrastructures communes) et à leur contribution essentielle à la richesse d'une société de "pénétration" (qui a contribué à la motivation du migrant...)

3) la liberté de migrer ne tient aucun compte des volumes de population respectifs des communautés d'origine et de pénétration. Si le total des populations du continent africain était inférieur à celui du continent européen il y a 60 ans, cette proportion est double aujourd'hui, et la proportion devrait être de quatre à un dans moins de 40 ans. Certains libertariens utilisent le déclin démographique de l'Europe pour justifier une immigration libre. Mais la transformation de l'Europe en une autre Afrique pose d'autres questions, et notamment celles des conséquences de cette transformation, en particulier la disparition des institutions et des "valeurs" européennes sous la pression d'institutions et de "valeurs" importées. S'il est commode de n'attribuer aucune valeur aux institutions de l'une des communautés (celle de pénétration), il est paradoxal de reconnaître que ce sont ces institutions qui ont créé la richesse qui, à son tour, a attiré cette immigration (et l'absence de ces institutions qui a été la cause de la misère dans les pays d'origine...).

4) Mr Salin reproche à l'Etat de s'être attribué l'autorité d'exclure les candidats à l'immigration. Mais une copropriété privée, elle aussi, peut exclure. Elle le fera d'ailleurs plus souvent si elle est libre de le faire (c'est-à-dire si la justice de l'Etat ne menace pas la copropriété de ségrégation ou de racisme). La sélectivité des comités chargés de l'admission de nouveaux occupants dans les immeubles huppés de Manhattan est devenue célèbre, et a même abouti au refus de certaines ... célébrités, jugées trop tapageuses et menaçantes pour la tranquillité de l'immeuble!

Mr Salin évoque l'exemple de la migration mexicaine vers deux Etats américains, le Texas et la Californie, et attribue la différence à un niveau de protection sociale plus élevé en Californie. Pour avoir traversé l'une de ces frontières (entre El Paso et Ciudad Juarez) et m'être déplacé dans les Etats mentionnés (Californie et Texas), j'ai pu constater que d'autres facteurs entrent en jeu. Si le passage à Tijuana est relativement aisé, celui du Rio Grande est contrôlé plus étroitement. Une fois en Californie, l'immigrant trouve de vastes communautés mexicaines dispersées dans tout l'Etat. Au Texas, les communautés les plus importantes se trouvent dans les villes proches de la frontière, particulièrement à El Paso où la proportion des habitants d'origine ou de nationalité mexicaines est plus élevée que dans la plupart des villes de Californie. L'urbanisation plus dense en Californie est très certainement un élément qui a facilité la pénétration et la dispersion des communautés mexicaines dans tout l'Etat.

Mais il est plus intéressant de s'interroger sur les raisons qui poussent les Mexicains à tenter leur chance chez les gringos. La plupart des états du sud des Etats-Unis ont fait partie de l'Amérique espagnole, comme en témoignent d'ailleurs le nom actuel de la plupart des villes. Les Etats-Unis ont soit acheté, soit conquis ces territoires, de la Californie au Texas. Un siècle et demi après les traités entérinant ces annexions de territoire, on est en droit de s'interroger sur ce qu'ils seraient aujourd'hui s'ils faisaient encore partie du Mexique. Verrait-on les mexicains du Texas se presser aux frontières nord de cet état mexicain pour passer chez les gringos? Ce sont en effet les institutions mises en place par ces gringos, leur culture, leur détermination à améliorer leur situation par leur propre effort, la cohésion de leurs communautés, leur attachement à la liberté individuelle et leur méfiance vis-à-vis de toute dictature, qui ont fait d'Etats anciennement mexicains des communautés très différentes de celles qui, aujourd'hui encore, au Mexique, contraignent les mexicains à migrer.

Dans sa défense du droit de n'importe qui à recevoir chez lui qui il souhaite, un droit que personne ne songerait à critiquer lorsqu'il s'agit de deux individus d'une même communauté, il prend évidemment pour exemple son droit d'inviter un intellectuel africain. Personne ne songera à lui contester ce droit non plus. Mais qu'en est-il s'il s'agit d'un dealer de drogues? d'un criminel? d'un vendeur de contrefaçons? d'une famille nombreuse qu'il faudra loger, nourrir, soigner, éduquer? Et qu'en est-il lorsque cet intellectuel, après avoir fourni la prestation payée par Mr Salin, décide de s'incruster, mais sans avoir d'autre employeur, ni d'autres moyens de subsistance? Un employeur, par définition, base ses décisions sur ses propres coûts et ses propres bénéfices. La prestation une fois payée, le bénéfice une fois engrangé, ce même employeur ne se soucie aucunement du coût pour la société d'un étranger sans ressources.

Mr Salin en arrive à affirmer que "c'est aux individus de définir jusqu'à quel point ils désirent vivre quotidiennement, au bureau, dans leur immeuble, dans leur famille, avec des hommes et des femmes qu'ils perçoivent comme des 'étrangers'." Ici aussi, aucune indication sur le mode de décision. Si mon voisin décide d'héberger une famille africaine, cette décision d'un autre affecte ma propre vie au quotidien. Si tout mon voisinage devient africain, je devrais m'interroger sur l'opportunité de rester dans un quartier dans lequel je serais moi-même devenu l' "étranger", ou de retrouver au contraire une communauté qui me serait familière, et dont je ne me sentirais pas exclu. Comme dans le paragraphe précédent, certains retireront des bénéfices de l'arrivée des immigrants (les marchands de sommeil, le "charity business", les avocats spécialisés dans les recours contre l'expulsion, les partis extrémistes, de gauche comme de droite, etc...)

La liberté n'est pas absolue, et ses limites ne sont pas seulement celles que fixe le droit de propriété. Personne ne peut mettre impunément le feu à sa maison lorsque celle-ci est mitoyenne avec d'autres propriétés. La liberté ne dispense pas non plus de tenir compte de la réalité: la décision d'une communauté de refuser ou d'accepter un immigrant malien, par exemple, pourrait être très différente selon qu'il s'agisse du premier malien demandant à faire partie d'une communauté, ou, au contraire, d'une communauté dont la majorité des membres sont des maliens. Revenant sur le processus de décision, quelles sont les chances du dernier non-Malien de s'opposer à cette nouvelle "admission"?

Le mal viendrait, selon Mr Salin, de ce que "les autorités françaises s'affirment arbitrairement propriétaires de ce pays", et donc accaparent le pouvoir d'autoriser ou de refuser l'entrée d' "étrangers" dans "leur" pays. Certes, cette accaparation est une imposture. Pour continuer la comparaison avec les copropriétés, l'Etat n'est là que le gérant (plus ou moins légitime) de la copropriété. Mais cela ne signifie pas que les "parties communes" de la copropriété (équivalant aux infrastructures dans une communauté plus importante, telle qu'une "nation"), possédées en indivision par les propriétaires, deviennent une "res nullius", une chose qui n'appartient à personne. Les "parties communes" d'une nation appartiennent donc à tous les habitants qui en ont payé le coût, bon gré mal gré, par leurs impôts. Lorsqu'un "copropriétaire" individuel invite un étranger (intellectuel ou rappeur) dans son bien personnel, il donne aussi à cet étranger la disposition de toutes les parties communes, et ce sans demander l'autorisation, ni même l'avis des autres copropriétaires. Si l'intellectuel africain que Mr Salin invite chez lui, à supposer que l'auteur habite dans un immeuble à appartements, et si cet intellectuel est venu avec sa femme et ses cinq enfants, tous les invités de Mr Salin utiliseront les ascenseurs et les escaliers, feront un barbecue le dimanche dans le jardin, rempliront les poubelles, recevront leurs propres amis. Pour paraphraser Frédéric Bastiat ("Ce qu'on voit et ce qu'on ne voit pas"), ce que Mr Salin voit, c'est sa liberté de recevoir chez lui qui il veut. Ce qu'on ne voit pas, ce sont les conséquences pour les autres copropriétaires (de l'immeuble, de la nation, peu importe), à qui l'on n'a rien demandé, qui devront subir - et payer - les conséquences, et qui, peut-être, un jour, se verront eux-mêmes contraints de fuir l'immeuble... Mr Salin ne propose aucune méthode fiable pour l'obtention d'un accord unanime sur l'usage des "biens communs".

Quant à ces "biens publics", Mr Salin estime que si l'État s'en est attribué la propriété, au lieu de se contenter du simple rôle de gérant, ce même État devrait "les rendre disponibles à tous" tout en laissant "les citoyens décider dans quelle mesure ils souhaitent établir des contrats avec des individus d'autres nationalités". C'est évidemment une utopie d'imaginer que, pour chaque étranger, il faudrait l'accord de tous les copropriétaires des biens publics, c'est-à-dire la totalité des citoyens. Plus sérieusement, ce raisonnement ne fait aucune distinction entre les biens publics existants (routes, écoles, etc..), leur entretien, et la construction de nouvelles infrastructures. Un étranger qui pénètre dans un pays y trouve (en général...) une infrastructure existante. C'est ce qui a contribué au niveau de vie existant au moment où il pénètre. Rappelons aussi que c'est parce que cette infrastructure est inexistante, ou mal employée, dans son pays d'origine, qu'il souhaite émigrer. Aucune contribution ne lui est demandée pour cette infrastructure existante (contrairement à une copropriété, où le prix d'acquisition comprend la valeur des parties communes).

Pire, si la contribution aux charges futures est inférieure à ce que coûtent l'entretien et le renouvellement de cette infrastructure, celle-ci va commencer à se dégrader. Citons ici l'exemple de l'empire romain. Les voies de communication existant au moment où les barbares pénètrent massivement se sont rapidement dégradées, faute d'entretien. La ville de Rome, comptant un million d'habitants au sommet de sa puissance, ne comptait plus que vingt mille habitants au cœur du Moyen-âge, pillée à de multiples reprises par les barbares. Les aqueducs indispensables à l'acheminement de l'eau vers la ville avaient notamment été vandalisés pour en voler les métaux, un peu comme aujourd'hui des bandes volent le cuivre des installations ferroviaires...

Ceci a eu des conséquences pour l'Europe pendant des siècles, ce que nous avons tendance à occulter. Comme le rappelait un historien allemand, "Cela semble incroyable, mais l'on pouvait, du temps des Romains, voyager plus rapidement et plus sûrement de Paris à Constantinople que l'on ne pouvait le faire jusqu'en 1800 environ". [2] Ce n'est évidemment pas à un libéral que l'on doit faire remarquer que l'effondrement des infrastructures (non seulement routières, mais aussi législatives, policières, judiciaires, commerciales, portuaires, scolaires, etc...) sous les pressions des barbares a eu pour conséquence de ramener le niveau de vie de l'Europe latine au niveau de celui des barbares, et non d'élever le niveau de vie de ces derniers à la hauteur de ce qu'avait connu l'empire à son apogée...

Mr Salin examine ensuite les qualifications des migrants eux-mêmes. Même s'il ne fait que le "supposer", il écrit que les migrants seraient plus "innovateurs", "plus courageux", "plus imaginatifs". Mais alors, pourquoi priver les pays d'origine de ces hommes et femmes exceptionnels qui auraient pu y changer les conditions de vie, et donc éliminer les raisons qui poussent à émigrer? En accueillant les meilleurs, les pays de pénétration ne font qu'aggraver l'écart des niveaux de vie, et donc renforcer les mouvements migratoires. Un exemple parmi des millions: le Congo (République "Démocratique") ne dispose que d'un médecin pour 10.000 habitants. Il arrive que des candidats médecins partent se former en Belgique, puis décident de s'établir dans ce pays. Or la Belgique dispose déjà de 42 médecins pour 10.000 habitants, soit 42 fois la moyenne congolaise. Peut-on déclarer que cette migration profite au pays de pénétration, déjà saturé, ou au pays d'origine, désespérément vide de centres médicaux, laissés à l'abandon après le départ de la "puissance coloniale"? [3]

Après avoir développé les deux premiers tiers de son argumentation sur une comparaison avec les copropriétés, Mr Salin passe de façon abrupte à la comparaison avec un club, ou une association. En effet, selon lui "le droit d'immigrer dans une nation ne peut pas être comparé à un droit de propriété dans une société anonyme ou dans une co-propriété parce que personne n'est juridiquement propriétaire de la nation.". Certes, mais alors, pourquoi consacrer la quasi-totalité de son raisonnement à la copropriété, pour en arriver, in fine, à admettre que cette comparaison n'est d'aucune utilité? D'autre part, en affirmant que "personne n'est juridiquement propriétaire de la nation", Salin confond la nature juridique de la communauté et les biens de celle-ci. La "nation" est une fiction. Les actifs de cette "nation", y compris ses biens immatériels tels que sa culture, ses institutions, la confiance entre ses membres, et la prévisibilité de comportement de l'un pour les autres, sont des avoirs biens réels, même si tous ne sont pas toujours tangibles.

Lorsque Mr Salin passe de l' "association" (ou de la copropriété, peu importe) au droit de vote, il associe ce droit au fait de payer des impôts. Si les immigrés paient des impôts, ils devraient donc avoir le droit de "décider de l'affectation de ces impôts". C'est bien sûr une antienne connue, répétée à gauche comme à droite, mais qui évite soigneusement d'aborder le problème d'un droit de décider (l'élection d'un maire, par exemple) sans rapport avec l'acceptation de prendre en charge le coût de ces décisions (la décision du maire de construire une piscine). Un avantage "social", un investissement public, une mesure fiscale, pourraient être approuvés selon le principe "un homme, une voix" (ceux qui approuvent n'auront pas à payer) et rejetés selon le principe "un euro, une voix" (la preuve de l'approbation devrait être dans le paiement, qui est un choix imposé à soi-même, et non dans l'approbation, qui est un choix imposé aux autres lorsque l'on n'est pas soi-même "imposable"). Mr Salin évoque un peu plus loin cette possibilité ("les droits de vote seraient proportionnels aux impôts payés par chacun") mais l'abandonne deux lignes plus bas ("chacun aurait un droit de vote identique, mais la cotisation perçue serait également la même pour tous"). Les deux systèmes sont évidemment très différents, à la fois dans leur principe et dans leurs effets!

C'est d'ailleurs le danger que rappelait Frédéric Bastiat dans la citation mentionnée par Mr Salin [4]. Mais la situation peut être bien pire: les immigrés se constitueraient en groupe de pression, avec des intérêts contraires à ceux de la communauté, et voteraient donc pour des représentants de leur propre groupe ethnique, religieux, culturel, national, etc.. Les bobos socialistes se déclarent horrifiés par la perspective d'une caste de riches qui se voteraient des avantages au détriment des autres catégories sociales. Ces bobos ne semblent pas voir que le vote des possédants ne vise qu'à protéger leurs droits, alors que le vote des immigrés tente d'arracher de nouveaux avantages à d'autres.

Sur l'éducation, Mr Salin évoque d'authentiques solutions libérales: la responsabilité des parents, la privatisation de l'enseignement, le "chèque-éducation". Mais les écoles dans les milieux dits "défavorisés" recréeraient des groupes identiques aux groupes dont sont originaires les élèves issus de l'immigration. Au pire, la société éclate. Au mieux, la multiplication des attitudes, des coutumes, des sentiments d'appartenance, des niveaux de confiance, aura pour résultat de compliquer et de renchérir tous les types de relations entre les individus de communautés restées différentes, si ce n'est hostiles.

Mr Salin considère que cet éclatement (qu'il nomme "différenciation") est un "plus". Mais c'est la prévisibilité des réactions, née d'une certaine "uniformité" de culture, qui a permis aux sociétés occidentales d'atteindre leur niveau actuel de développement. Avec cette "différenciation", la société cesse d'être prévisible, et les individus se replient sur un environnement plus restreint. Dans des quartiers où tout le monde se saluait il y a quarante ans, personne ne s'adresse la parole aujourd'hui. Aucun autochtone ne songerait aujourd'hui à souhaiter le bonjour à une femme voilée, qui, par son accoutrement, marque précisément sa volonté de se démarquer. un peu comme si l'étoile jaune et les ghettos avaient été imposés aux juifs par eux-mêmes.

De plus, Mr Salin critique ce "sentiment d'appartenance à la nation". Or, personne n' "appartient" à qui que ce soit, ni, surtout, à un concept artificiel tel que celui de "nation". Chaque individu "fait partie" (il n' "appartient" pas) de divers groupes, du plus petit (la famille, le cercle d'amis) au plus grand. Chacun de ces groupes nous forment, nous éduquent, nous transmettent leurs habitudes (bonnes et mauvaises), leurs institutions, leurs cultures. La "nation" est tout autant une fiction que l' "État".

Mais Mr Salin reprend la proposition de Gary Becker de "vendre" la nationalité. Pourquoi pas? Mais, dans cette hypothèse, qui encaisserait les droits d'entrée? Quant à ceux qui achèteraient ces "droits", il s'agirait, selon Mr Salin, des "plus aptes à produire des richesses dans la nation d'accueil". Mais, dans ce cas, pourquoi n'auraient-ils pas produit ces richesses dans leurs pays d'origine? Et c'est ici que l'on voit la faiblesse de ce raisonnement. Acheter un droit d'entrée ne produit aucune richesse. Ce sont les "us et coutumes", la confiance entre les membres, la culture, qui ont rendu possible cette création dans le passé. Non seulement ces "us et coutumes" ne peuvent s'acheter. De plus en plus, d'ailleurs, les nouvelles vagues d'immigrants les rejettent, pour revenir aux comportements de leurs pays d'origine.

Enfin, Mr Salin voit une solution pour prendre la place d' "une politique nationale d'immigration": "que l'autorisation de séjour soit donnée au niveau des municipalités". Aucun des problèmes qu'entraînerait une telle politique n'est évoqué. Pourtant, il est d'abord à craindre que des municipalités où la majorité de la population est déjà d'origine étrangère (c'est le cas dans plusieurs communes de Bruxelles) serait particulièrement généreuses avec l'octroi de ces autorisations, recréant ainsi des enclaves étrangères qui s'étendraient comme des taches d'huiles. Pire, obtenir une "autorisation" permet évidemment de circuler dans toutes les parties du territoire (un Etat particulier ou même l'espace Schengen). Mr Salin ne peut sérieusement envisager que l'autorisation soit limitée au territoire d'une municipalité. Il est aussi à craindre que les autres municipalités (ou Etats) ne limitent la liberté de circuler de tous les ressortissants de l'Etat qui distribue ainsi les autorisations de séjour. Des libertés existantes seraient donc tout simplement éliminées, de la même manière que les actes criminels de 19 terroristes moyen-orientaux le 11 septembre 2001 ont, depuis lors, réduit les libertés fondamentales de centaines de millions de voyageurs. Si ces 19 déments n'avaient pas été autorisés à séjourner en Occident, les libertés de milliards d'autres personnes seraient encore intactes!

Contrairement à ce qu'affirme Mr Salin dans sa conclusion, l'immigration peut être un véritable problème. Et c'est quelqu'un qui a été migrant toute sa vie qui l'affirme. Comme les langues de la fable d'Esope, les migrations peuvent être les meilleures mais aussi les pires des choses. L'article de Mr Salin n'offre aucun moyen de distinguer les premières des secondes. Heureusement, Mr Salin termine par une conclusion avec laquelle tout libéral peut être d'accord: "Le problème c'est l'Etat."


NOTES

[1] "L'immigration dans une société libre", chapitre 11 de l'ouvrage de Pascal Salin "Libéralisme", Odile Jacob, 2000.
[2] Benno Hubensteiner, "Bayerische Geschichte" ("Histoire de la Bavière"), Rosenheimer, 2009, page 24.
[3] Les statistiques sont tirées des base de données des Nations-Unies et de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS)
http://data.un.org/Data.aspx?d=WHO&f=MEASURE_CODE%3aWHS6_125
[4] La citation que fait Mr Salin est légèrement différente de l'original. Pour Mr Salin, Bastiat aurait écrit que l'Etat est "cette fiction par laquelle chacun s'efforce de vivre aux dépens des autres" En fait, la citation correcte est "L'État, c'est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s'efforce de vivre aux dépens de tout le monde." La citation originale décrit beaucoup mieux la perversion de cet Etat: tout le monde est profiteur, et tout le monde est victime.